À l’Abbaye de la Pierre Qui Vire, 30 Juin 2019

Père Bruno Régent

" Discerner aujourd'hui "

Je vais essayer de répondre à la question qui m’est posée sur mes choix en donnant une série d’exemples, de choix, quotidiens ou pas quotidiens. Vous devinerez un peu à la fois quel est mon paysage, combien de choix je n’arrête pas de faire dans ma vie.

Alors en voici quelques-uns et la manière dont j’essaie de les traiter.

Par exemple, j’accompagne un certain nombre de gens, sur le plan spirituel, des hommes, des femmes, des prêtres, des religieuses, des plus jeunes et des moins jeunes...

Je peux me préparer intérieurement à recevoir une personne, mais je ne sais jamais à l’avance ce que je vais effectivement dire. Il y a à écouter, … à écouter encore attentivement, et à laisser l’Esprit m’inspirer de ce qu’il y a à dire. La manière dont la personne recevra ce qui est dit, dira si ce que j’ai dit porte du fruit, mais je n’ai rien à défendre et ce que je dis n’est pas mon idée.

Je vais dans une semaine prêcher une retraite. Ça m’arrive de donner des topos comme cette après-midi. Là c’est un travail de longue haleine, je rumine, j’aime bien avoir six mois pour y penser, puis repenser, puis je fais des lectures, je prends des notes éparses et je me concentre pour ressaisir. Pour moi, ce n’est pas un travail intellectuel, je ne fais pas de la compilation de dizaines de livres, mais c’est un travail d’abord de recueillement.

Je fais pas mal de juridique et d’immobilier comme maître d’ouvrage, par exemple, suivi de chantier, et non comme utilisateur final. Je ne travaille pas directement pour moi, mais pour des communautés qui vont occuper les bâtiments ou pour des centres spirituels. Alors pour le choix des couleurs, le choix d’un certain nombre de revêtements, de sols, etc… je m’en remets aux utilisateurs du moment, pourvu qu’ils aient un peu de goût et s’entourent de personnes qui ont du goût. Par contre, sur les enjeux financiers, les grandes masses, les plans d’ensemble, là, je suis beaucoup plus à décider dans le cadre d’une délégation générale qui m’est faite par la congrégation, par les Jésuites. Voilà, j’essaie d’aller vite sinon le chantier prend du retard.

Sur les questions juridiques : les questions juridiques c’est encore pire que l’immobilier, ce sont des questions qui touchent au très long terme. Du coup, je rumine, j’en parle, je donne mon avis, je n’hésite pas à pinailler s’il le faut. J’essaie vraiment d’être à l’écoute de ce que les uns et les autres disent et la qualité de ce qu’ils disent : c’est–à-dire sont-ils dans l’affectif ? ou dans le juridique ? Parlent-ils d’expérience ? Où se fondent les arguments qu’ils donnent ?

Dans beaucoup de situations, je choisis par expérience ou par conviction spirituelle de dire ce que je pense, sans attendre que ce soit inattaquable. Je le dis pour m’en libérer et pour que ce soit utile, utile pour moi, comme ça je n’ai plus à y penser, où bien je découvre que je pensais de travers, donc c’est utile de changer d’avis. Et puis, ça peut être utile pour les autres parce qu’il m’arrive d’avoir des intuitions dont les autres me révèlent la pertinence. Après tout si ça les aident, … tant mieux.

Il m’arrive d’écrire des livres. Si vous souhaitez savoir ce que j’écris, il faut me le demander tout à l’heure, je n'ai pas prévu d’en parler ici. C’est pour moi une expérience un peu étonnante au sens où, autant des articles, je les écris sur commande, pour des revues qui me les demandent.

Un livre, ce n'est jamais sur commande. C’est toujours par nécessité intérieure. C’est un choix qui s’impose à mon être intérieur. Voilà, il y a un matin où je me lève, j’ai pris beaucoup de notes sur un sujet depuis longtemps, mais il y a des dizaines de sujets sur lesquels je prends des notes… et puis un matin, je me dis : "ah ! C’est mûr, il faut que j’y aille". Et en quinze jours-trois semaines, le brouillon est complétement écrit. En faisant une heure ou deux d’écriture chaque matin. Je n’ai jamais eu de facilité pour écrire. Donc c’est toujours une expérience très étonnante.

Je suis comme d’autres dans un contexte d’hyperactivité. Je suis peut-être à la retraite civile, depuis plus de dix ans, mais je suis encore complètement en activité tous azimuts.

J’ai plus de trente mails par jour concernant des sujets sur lesquels on me demande un avis, ou on me tient au courant de l’évolution d’un dossier. Je trouve que c’est fatiguant.

Ça a beaucoup changé par rapport à il y a vingt ans, on n’était pas du tout comme cela avec le téléphone portable et les mails. C’est une expérience étrange d’être amené à zapper d’un sujet sur l’autre toutes les minutes ou toutes les deux minutes. Du coup, je me donne quelques règles : ne pas être un accro de l’internet ni du téléphone.

Ça m’étonne, par exemple, quand j’ai un confrère qui a son téléphone dans sa poche pendant la messe, ça vibre, et on le voit sortir pour répondre. Je trouve cela insupportable.

Mais voilà ! Quand je suis en entretien, en réunion je me refuse de décrocher, ou de savoir qui appelle,… Je ne suis là pour la personne. Je suis en réunion puis c’est tout. Ou bien si je suis en travail d’écriture, le téléphone peut sonner… je suis en travail d’écriture… c’est tout.

L’important c’est pour moi d’être dans l’instant présent à ce que je fais. Donc, il y a des plages d’internet, où je zappe pendant deux heures sur trente sujets, et il y a d’autres plages dans la journée, mais désolé, où je ne suis pas là et puis c’est tout.

Donc je m’impose des plages en lecture, en écriture, évidemment en prière et si je n’ai pas chaque jour entre une demi-heure et deux heures par jour de concentration de temps personnel, il y quelque chose en moi qui est fatigué et qui n'est pas bon.

Encore un détail sur ma vie, j’habite en communauté à Versailles, avec 11 personnes. J’en suis le supérieur et j’ai un bureau de travail à Paris, au service des Jésuites.

Je vais trois par semaines environ à Paris. Tous les déplacements, hiver comme été, je les fais en vélo, ou il faut qu'il y ait vraiment de gros orages... Et là encore, on ne peut pas m’y déranger et je peux mesurer un peu mon état intérieur aux injures possibles que j’exprime envers ceux des automobilistes qui me gênent sur la route : ils ont droit à quelques jurons !

Je ne regarde jamais la télévision, jamais. Je n’écoute pas la radio. Même en voiture. Je lis des journaux, plutôt des périodiques. Je lis "Études" et "Christus" en entier.

Je me tiens au courant des grands titres sur internet. Il me semble, j’entre dans un petit jugement, que les médias, télé et radio, ont davantage une fonction de distraction et d’émotion, et ces deux fonctions me conviennent peu. La distraction me sort de la concentration et de la présence. L’émotion, à partir de ces médias, me semble beaucoup trop manipulée par l’émetteur. Je me ressens comme me faisant balader dans mes indignations, mes condamnations par une information partielle et partiale, alors qu’il m’est demandé de me tenir dans la présence à Dieu pour lire les signes des temps.

Alors bien sûr les évènements du monde, de l’Église, de la famille, de ma communauté, ce qui arrive à mes frères, du monde professionnel, évidemment, ces évènements sont importants… mais ils sont importants pour y lire des appels, et pour les interpréter, et non pas pour la conversation de salon, de montrer qu'à table, effectivement de dire : « je suis au courant ».

Alors, pour donner une petite citation biblique, y en aura d’autres, on avait il n'y pas longtemps dans un évangile « si mon œil intérieur est dans les ténèbres, mon corps est dans les ténèbres, et si donc la lumière qui est en toi est ténèbres, comme elles sont grandes les ténèbres » concluait cet évangile.Ce qui veut dire que si mon œilintérieur est dans les ténèbres, ça veut dire « je suis dans l’absence de foi », dans l’absence de présence à Dieu… en nous, en moi, et dans les autres. Dieu qui est lumière. Donc, si je suis dans l’absence de foi, du coup, je ne projette pas de lumière sur le monde. Et ainsi, nous ne faisons pas l’œuvre de Dieu. L’œuvre de Dieu, c’est de croire. La lumière vient toujours de la foi, de la lumière intérieure, de la présence, et non d’un jugement mondain qui ne sait que s’indigner, murmurer, comparer dans la jalousie, etc…

Un dernier détail personnel, avant de passer à des choses autres, quand je repense à un choix particulier, celui de mon entrée au noviciat des Jésuites, à 18 ans. J’ai frappé une première fois à la porte à 17 ans. Je me souviens, pas trop dans mon enfance, mais en tout cas au début de l’adolescence, toute l’adolescence, il y a eu une longue phase de progressives petites touches. J’ai développé un goût pour les maths et je me suis vu professeur de maths. Et j’ai voulu être professeur de maths et je l’ai été pendant 14 ans. Et je l’ai fait, je m’accuse, avec beaucoup de plaisir. J’ai développé un goût pour la prière. Ma communion solennelle a été un moment très, très vrai, c’est-à-dire je ne savais pas ce à quoi cela m’engageait pour l’avenir… c’était sans imaginaire, mais j’étais présent à la cérémonie et ce que je fais, ce que je dis, j’y crois.

Une retraite en classe de seconde ouvrait trois hypothèses : Être prof de maths, être prêtre, ou être moine.

Mais, il n’y avait rien à décider. Donc tranquille… pas toujours écrire… et puis j’avais mis quelques raisons pour et quelques raisons contre.

Et en classe de terminale, il y avait une retraite dite de fin d’études. Et dans mon imaginaire, je me projetais en disant, je vais faire une retraite tranquille, je vais reprendre mes trois hypothèses et je vais faire un discernement…

Raté. La retraite de fin d’études était obligatoire, et ça a été un chahut. Impossible de me concentrer, mes camarades d’études faisaient le boxon dans les couloirs. Donc je n’ai absolument pas eu la retraite à laquelle je rêvais. Et donc, je me suis dit : je n'ai pas les conditions pour décider, mais je suis en terminale, il faut que je décide ce que je fais l’année prochaine… Oh ! c’est pas compliqué, je prends les trois pages : "je peux être moine, je peux être prêtre, je peux être profs de maths, si je suis jésuite, terminé".

Donc, ça s’est décidé en cinq minutes dans des conditions qui n’étaient pas bonnes et où je me disais, il faut que je décide, et puis voilà.

Alors, bien évidemment, après être rentré au noviciat, il y eut bien des phases de maturation, bien des découvertes que mes intentions n’étaient pas pures, que c’était mélangé, que etc… et puis, bien voilà, j’allais dire le chemin s’est poursuivi, le choix m’a été redonné d’être refait et approfondi et le chemin se poursuit.

Voilà, première partie.

Deuxième partie :

Des choix dont je suis ou dont j’ai été témoin direct et qui me semblent particulièrement significatifs. Alors je vais donner des prénoms parce que c’est plus intéressant pour mon imaginaire de donner des prénoms, mais en les changeant, je serai un peu plus sûr que vous ne les retrouverez pas.

Je pense à Jean, 60 ans, chef d’entreprise, 1500 personnes, il en est le PDG, actionnaire principal, entreprise familiale, et il s’interroge en disant :

"Voilà, j’ai exercé ma vie dans le monde de l’entreprise, une boîte intéressante, ça me passionne : est-ce qu’il vaut mieux que je reste au service de la boîte ? Encore trois-quatre ans, ou bien, ah, j’ai envie de changer de vie, ça m’intéresserait d’être militant ATD-Quart Monde". Et donc, dans un groupe de vie chrétienne, pendant quelque mois, on l’a vu exposer ces questions, donner des raisons pour, des raisons contre… Sa femme était là, elle écoutait, et puis il a fait son chemin… Il est parti à ATD-Quart Monde.

Complétement autre chose : un jeune, 27 ans, Xavier, a envie de devenir prêtre, en particulier parce qu’il a eu des aumôniers qui l’ont beaucoup poussé. Et puis, il rentre aujourd’hui au séminaire, on a une année de propédeutique. Il y arrive avec beaucoup de générosité et au bout d’un mois, environ, il tombe malade. En gros, son corps lui dit que ce choix c’est n’importe quoi et ça ne lui convient pas. D’un côté, il décide peut-être un peu sur la pression d’un entourage, et d’une générosité, où il se dit : "ce serait bien que"… Et puis, voilà, il décide en disant : "non, ce que je découvre dans mon existence, dans ce qui résiste en moi, ce n'est pas fait pour moi".

Je pense à un couple : ils sont tous les deux jeunes retraités, ça fait cinq ans que, elle, elle a envie de changer de région, de quitter la région parisienne, et elle envoie des vagues successives… et le mari est un homme qui ne sait pas décider… au moins dans la vie familiale. Dans la vie professionnelle, il n’a pas arrêté de décider, mais voilà… Et donc, oui, non, bon, bref,… pour finir… là aussi c’est dans un groupe, on les voit discerner, ils se font interpeller… ça parle ; plusieurs dans le groupe essaient de leur dire : "mais posez votre question, on va vous aider" …et ils n’osent pas poser la question dans le groupe… pour finir… ils ont dit : "ah si… on va essayer de discerner avec Bruno"… avec moi… Je les ai reçus en me disant très bien… je les ai écoutés… pendant une heure et demie, …et surtout lui, indécidable. Il est parti. Deux mois après la maison était en vente, c’était fait : il avait décidé de partir. Et quand le groupe lui a demandé de relire, en disant : "mais comment t’as décidé de partir ?" Il m’a dit, "j’ai été écouté… On ne m’a rien dit : mais j’ai été écouté… Et le fait d’avoir été écouté sur le fond et que mes réticences soient vraiment entendues. Ma femme était là, elle écoutait… eh bien, c’est bon, ça veut dire que j’ai dit ce que j’avais à dire. Donc je suis libre, je peux décider". Là, c’est une histoire un peu compliquée… mais… là aussi un dialogue entre un homme et une femme…

Je pense à telle personne, qui, comme ça arrive trop souvent, est en addiction sur internet, sur des questions de pornographie etc.…

Combien de temps, trois ans sans doute, avant d’oser demander une aide à un professionnel… en disant : "je veux m’en sortir… Comme je vois que je ne m’en sors pas tout seul, je me rends compte que je me fais du mal, je ne m’en sors pas. Et donc, j'arrive à la décision de dire : je vais me faire aider". Voilà.

Combien de couples que je vois dans des situations de relations homme-femme difficiles. Des dialogues compliqués… Ah ! la ! la ! Et parfois, au-delà du dialogue… ça veut dire qu’il y eut des épreuves, des trahisons,… et puis des hommes et des femmes qui vivent avec et à travers et combien il y a des choix qui se font humbles, modestes, mais en même temps très forts et très courageux, on est dans l’incarnation, on n’est pas dans des choix qui sont dans des rêves d’une générosité débordante, on est dans… ça sonne, ça sonne juste !

Je pourrais encore pour vous donner deux, trois choix…

Un, complétement extérieur : un groupe de jeunes autistes, à Lourdes… en animation de ce groupe j'essaye de les faire parler, partager. Un jeune autiste de 10 ans, j’allais dire "pète un peu les plombs", et devient insupportable, se met à crier, et donc comme animateur, il faut faire quelque chose… je vais l’exclure, je vais… etc… Il sème la pagaille dans tout le groupe.

Et voilà qu’un autre autiste, 16 ans, un peu plus grand, se lève, va s’asseoir à côté de lui, lui prend la main, le calme et ils vont passer toute l’après-midi ensemble. Et cela a été beaucoup mieux que n’importe quel animateur bien dans sa tête et que ce qu’il aurait fait aurait pu être violent. Il y a des pauvres qui ont un sens du rapport à d’autres pauvres qui font mieux que toutes nos bonnes intentions.

Et puis il m’est arrivé d’être supérieur majeur, donc d’avoir des responsabilités par rapport aux jésuites, de mission, d’envoyer des gens, d’ouvrir ou de fermer des communautés, etc…

Alors je repense par exemple à un jésuite : trois ans de suite j’entends combien toute la communauté est agacée, n’en peut plus, l’œuvre dans laquelle il travaille, ça ne va pas, les laïcs qui sont responsables me disent : "il faut qu’il libère le poste sur lequel il est". Et lui âgé, attaché, vraiment pas libre, depuis plus de dix au même endroit, ayant vécu l’un ou l’autre départ, d’autres œuvres difficiles et donc… qu’est-ce qu’on fait ? Qu’est-ce qu’on décide ?

Pour finir, après bien des hésitations, je me suis dit le bien de l’œuvre, le bien de la communauté, ce que j’entends, je vais lui demander de partir dans une autre communauté pour telle mission. Voilà, j’en ai rarement pris autant dans la figure que de demander une telle chose. Mais pour finir, il est parti. Il a accepté.

Mais voilà, ça veut dire, il y a des choix, on décide, mais ne on sait pas quoi,… et quand il s’agit de la vie des autres, on prend des risques, des risques humains, des risques de santé, comment il va rebondir… Donc on a beau dire qu’on à l’Esprit-Saint, on fait ce qu’on peut…

Ayant fini cette première grande partie un peu de témoignages d’horizon, la question du choix se pose sous la forme « que faire ? » Et pour moi, ce que je développe c’est ça n’est pas « que faire ? » La question du « que faire ? » n’est pas intéressante et elle est secondaire. La question première c’est celle de l’être. Le faire, il est ordonné à l’être. C’est–à-dire que les moyens sont sans cesse ordonnés à la fin. Quelle est la finalité ? Et très souvent, nous prenons des moyens pour la finalité. Et cette confusion entre la fin et les moyens est dommageable. Par exemple, la fin est-elle d’être en bonne santé ? Est-ce que c’est une fin ou un moyen ? Eh bien, vous voyez que sur un point comme ça, si on est au journal télévisé, on va évidemment dire que c’est une fin. Si on est devant le Seigneur et qu’on est devant les autres, sans doute que ça n’est pas une fin mais que c’est un moyen. C’est un moyen d’être au service, d’être en relation avec d’autres,… Si on le prend comme une fin, j’allais dire, ce qu’on va dire aux personnes malades risque d’être bien ambigüe et bien compliqué. Si c’est un moyen, ça veut dire qu’on peut se tenir comme être humain avec un malade.

Que devons-nous faire ?

Alors par exemple, c’est la question à Cana. « Il n’y a plus de vin » : qu’est-ce qu’il faut faire ? Marie envoie un message à Jésus, comme une prière discrète, « Ils n’ont pas de vin » C’est tout.

Pour l’envoi en mission, qui est quand même undesgrands textes de référence dans l’Évangile, quand Jésus envoie en mission, il commence par dire « la moisson est abondante, les ouvriers sont peu nombreux, priez donc le maître de la maison d’envoyer des ouvriers pour la moisson… »

Premier point, il leur demande de prier, et non pas de retrousser les manches, "les gars, y faut y aller, y a du boulot, ça va être dur"... Non, non "prier" ! Ensuite, une fois qu’ils sont envoyés, il leur dit : "oh, vous y aller sans sac, sans besace, sans bourse, etc… Vivez de l’accueil. C’est-à-dire allez dans une maison et mangez et buvez ce qu’on vous servira".

Être missionnaire, c’est oser dans la vulnérabilité et dans la fragilité se laisser faire par l’accueil des autres. Et c’est évangélique, puisque c’est manifester aux autres que nous avons confiance en eux, confiance dans ce qui fait leur vie, confiance dans ce qu’ils mangent, ce qu’ils boivent, que leur vie nous intéresse. Voilà et nous nous approchons d’eux. Et du coup, il est tout simple pour le missionnaire de dire à ces gens qui ont ouvert leur porte : « Le Royaume de Dieu est tout proche de vous ! »

Donc on n’arrive pas avec un sac plein de livres dethéologie, de tas de choses qu’on va déverser, de pleins d’idées de service qu’on va rendre, etc… etc… On arrive en se laissant accueillir par ce que sont les gens.

La question des disciples quand Jésus leur dit de nourrir une foule de 5 000 personnes, qui viennent de l’écouter toute l’après-midi… sans doute il a fait chaud, etc… Et les disciples disent : "il faut quand même les laisser aller manger, c’est important", et le Seigneur leur demande simplement d’apporter leurs 5 pains et leurs deux poissons. D’apporter le peu qu’ils ont, de le donner, que Jésus en disent du bien, donc ne pas dire "c’est trop peu, ça va pas servir", non, non, dire du bien du tout peu qu’ils ont, des cinq pains et des deux poissons, d’accepter que ce soit rompu et du coup au lieu d’être accaparé et garder pour un picotin dans son coin que ça puisse être partager, et c’est partagé à 5 000 personnes.

L’œuvre de Dieu : nous avons envie de faire l’œuvre de Dieu. Que faire ? L’œuvre de Dieu c’est que vous croyez, évangile de Jean, chapitre 6. La première urgence,c’est de se convertir, c’est de changer de regard. Le monde n’arrête pas de nous provoquer en nous présentant des problèmes, des difficultés et ils nous invitent à être le sauveur ici et là. Or la manière dont le monde, dont le Satan, l’ennemi de la nature humaine nous présente les problèmes, elle est mauvaise. C’est comme le Canada Dry, ça ressemble à de la bière, c’est tout proche mais ça n’en est pas.

J’aime bien Kauffman quand il a été détenu, en rétention pendant de longues semaines au Liban, plusieurs années après, un journaliste l’a fait revenir au Liban et il l’a promené dans les rues de Beyrouth, c’était encore une période de grande violence, et ils se promenaient dans un quartier où on voyait des gens en armes, des jeunes qui hurlaient, etc… Et le journaliste se tourne vers lui en lui disant… Oui, oui, vous vous rendez compte ; on a souvent entendu ce pays pourri, ce pays difficile, tout ce qui est à faire, etc… Et Kauffman lui a dit:" "écoutez monsieur, taisez-vous, arrêtez, c’est n’importe quoi ce que vous dites, ce que vous faites, commencez par vous recueillir". Les mois de détention qu’il a eu lui ont donné une intériorité, une manière de peser les choses qui fait que le regard se convertit.

C‘est sûr, ça peut être difficile de dire la première tâche avant de faire, c’est de se convertir et bien des penseurs ont renvoyé aux chrétiens que c’était l’opium du peuple. Mais qu’est-ce que la justice ? Qu’est-ce que le respect de l’autre ? Qu’est-ce c’est que le partage ? Combien il y a à se convertir pour ne pas tomber sur des simplismes, gagner en profondeur et ne pas être manipulé par des émotions immédiates. Qu’est-ce qui est juste ?

L’incendie de la cathédrale de Paris, c’est exemplaire. Combien l’émotion devant l’incendie a suscité immédiatement une mobilisation. Mais vraiment, l’impression que j’ai, c’est qu’il n’y a pas eu d’espace pour qu’on se pose vraiment la question : que devons-nous faire ?

Ce qui émerge, c’est que nous sommes appelés à de la profondeur, la profondeur du cœur qui est touché au bon endroit. Dieu devant l’humanité qui se perd, on peut imaginer qu’il se pose la question, dans la Trinité, que devons-nous faire ? Et Ignace de Loyola dit que la Trinité se dit « faisons l’Incarnation ! » c’est-à-dire rejoignons l’humanité dans son cœur, dans ses enfers, dans sa détresse, en apprenant l’humanité à regarder les hommes et les femmes autrement. Guérissons leurs yeux, leur manière d’entendre, leur cœur, qu’ils voient le monde autrement. Que les pécheurs ne soient pas méprisés mais qu’ils soient les maîtres du monde.

La parabole de Luc 16, que vous connaissez peut-être, qui est toujoursdifficile à interpréter qui est cet intendant qui va se faire retirer la gérance parce qu’il est dénoncé par son maître comme étant quelqu’un qui dilapide, et du coup il se dit : que vais-je faire ? Et il appelle les créanciers de son maître en disant à l’un, il est marqué 100, met 80, il est marqué 100, met 50, il diminue les dettes. Pour moi l’essentiel de la parabole, et qui revient dans la conclusion, c’est la question : "que devons-nous faire ?" qui est une question urgente. Cet intendant va se faire renvoyer par son maître. La décision est prise. Et en même temps, il a encore la signature. Donc il y a un tout petit espace où il a encore la signature : que peut-il faire ? Et l’idée qui lui vient, "je vais me faire des amis avec les pauvres, parce que, eux, quand je n'aurai plus rien, ils vontm’accueillir. Et là, formidable, je vais être accueilli."

Ce monde demande desdécisions urgentes, bientôt nous allons perdre la signature, nous n’aurons plus d’espace de liberté, nous n’aurons plus de capacité à choisir, que voulons-nous faire de notre vie ? Et l’intendant se dit, ah, "j’ai encore un petit espace de liberté, je vais me faire des amis avec les pauvres. Parce que là, j’investis dans un trésor qui ne s’usera pas. Ils en garderont une reconnaissance éternelle."

Alors le discernement, porte d’avantage sur le "comment", sur "la conversion" plutôt que sur le "où" ou sur le "quoi" ? Le "où" et le "quoi" sont souvent abordés en vue d’unedimension politique ou médiatique mais rarement sur le fond.

Combien, par exemple, dans la société française avec toutes les questions soulevées par les giletsjaunes, mais il y a bien d’autres questions, la question de la justice, etc… Combien j’entends que cette société est composée de citoyens qui murmurent, qui râlent, qui se plaignent, qui se jalousent, qui se comparent, voilà, eh bien une telle société vivra toujours mal quels que soient les patrons, quelles que soient les lois, quelles que soient les décisions, quelles que soient les baisses d’impôts, rien nechangera, quelqu’un qui a un tempérament de râler sera toujours un râleur et ça ne peut pas construire une vie en société.

Bon, encore un petit point, Dieu nous demande, j’allais dire on a envie, on lit dans l’évangile nous avons à aimer Dieu de toutes ses forces. Et le risque, c’est d’aimer l’image de soi-même qui se prend pour Dieu. C’est-à-dire qu’on a envie de pouvoir dire, "oh oui, je suis généreux, j’aime bien et tels services que je vais rendre, il va me donner une bonne carte de visite, ça va être médiatiquement très bien. Et donc je vais prendre tel service social, ça c’est bien"… Mais au lieu d’aimer l’autre, on aime l’image de soi que l’on construit sur le dos de celui qu’on va aider. Voyez comment la question de la conversion, elle, touche à des choses qui sont en fait intimes sur les motivations, sur la manière dont le cœur est guidé dans les choix.

Dans le langage ignacien, il y a d’un côté la question du discernement, discernement des esprits, et de l’autre, la question de la délibération. Quand on délibère, on pèse le pour et le contre, on écrit des arguments et on essaie de prendre une décision la moins mauvaise possible, en fonction des critères que l’ons’est donnés.

Et même à l’Assemblée Nationale en votant des lois, on peut espérer penser que les députés votent à partir d’un certain nombre de critères favorables et défavorables, alors on peut ne pas être très content des critères qu’ils sedonnent, mais ils ont des critères. Un des critères, ça peut être par exemple est-ce que ça va être une révolution ? Est-ce que ça va être supportable pour les gens ? Est-ce que je vais avoir une opposition médiatique ? Le critère n’est pas forcément celui de la justice, au sens d’être ce qui va aider de plus pauvres par rapport à de plus riches, mais ça va être une décision pesée par "qu’est-ce qui est supportable aujourd’hui dans les contradictions de la société française ?" Très bien, et on délibère. Et il en est ainsi aujourd'hui sur les questions de bioéthique.

Au-delà de ça, il y a à savoir, disons, pour des chrétiens en particulier, où fonder son jugement ? Dans ce jeu démocratique, quelles sont mes convictions personnelles, et dans le jeu politique, comment je fais jouer mes convictions personnelles. On peut avoir des convictions personnelles pour soi et suivre l’évangile, et je vois dans ma communauté, l’un ou l’autre, à tort ou à raison, en tout cas ça fait partie des débats qu’on peut avoir entre nous, pense que ses convictions personnelles ne sont pas imposées à une société démocratique comme la France aujourd’hui. D’autres trouvent que ce sont des valeurs fondamentales et qu’au contraire, il faut les partager au plus grand nombre. Très bien : on en débat.

Le discernement des esprits : alors c’est différent. Le discernement des esprits part d’une certaine vision spirituelle. C’est une expression qui vient en gros de la fin du moyen-âge, qui est classique chez tous les spirituels, nous sommes chacun le siège d’un combat entre deux esprits : un esprit mauvais et un esprit bon, un esprit de Dieu qui nous attire vers la générosité, vers l’amour, vers le bien, vers la joie, et un esprit qui est l’ennemi de la nature humaine, qui nous referme sur nous-même, qui nous fait convoiter, qui nous crispe sur des sécurités et qui pour finir ne nous fait pas vivre, nous enferme sur nous.

Le discernement des esprits, c’est de se dire "ce qui me traverse, les idées qui me viennent, ce que je porte, est-ce que ça vient du bon esprit ou est-ce ça vient du mauvais esprit ? D’où cela vient-il ? Où cela me mène-t-il ?" Donc ça veut dire qu’on observe un climat intérieur qui n’est pas exactement celui de ses sentiments, ce n'est pas simplement le goût que l’on a.

Les spirituels disent c’est plutôt de l’ordre de la motion. "Comment est-ce que quand cette idée m’est venue, ça m‘a inquiété ou c’était une idée qui vient progressivement. Et puis comment, quelle est son histoire, quelle est son déroulé,"…

On peut voir par exemple dans une retraite, une décision qui, pour finir, se prend. La personne qui fait retraite pense que c’est bien pesé, c’est décidé et dans l’esprit puisque c’est dans la prière.

Et puis une fois que le retraité est sorti, une décision ce n'est jamais une décision pour soi tout seul, c’est toujours en rapport à d’autres. Si je décide de devenir prêtre, il va y avoir un évêque, il a de l’altérité, mais si je décide de me marier, il va y avoir un conjoint, etc… L’épreuve du temps montre si la décision qui a été prise est fondée, si elle est bonne, si elle est réaliste ou au contraire si elle est mal fondée et si elle est dans mon imaginaire. Mon imaginaire tout à fait généreux, mais n’empêche… c’est pas juste…

Et donc le discernement des esprits, il est une attention à l’histoire pour progressivement repérer comment l’esprit de la nature humaine m’entraîne et comment au contraire, l’esprit bon m’entraîne. Alors si je suis complétement un débutant dans la vie spirituelle et que j’y connais rien, l’esprit mauvais, lui, va m’attirer par des tentations grossières. Voilà c’est internet, le porno, c’est je ne sais plus quoi, des tentations grossières qui font qu’on va succomber. Si au contraire, je commence à repérer ces pièges grossiers du malin, alors le malin peut devenir plus subtil, en disant : "oui t’es généreux, oui quand même t’es quelqu’un de bien, mais regarde tous les besoins qu’il y a dans le monde, regarde tout ce qu’il faut faire" et pour finir l’ennemi de la nature humaine, "il fait que je me disperse dans une générosité débordante et que je n’ai plus d’intériorité, je n’ai plus rien à dire. Il me vide et pour finir çà m’inquiète".

Donc la question du discernement des esprits, elle peut être un peu compliquée, dans l’histoire, un peu à la fois, et dans laspiritualité ignatienne il nous est demandé la possibilité de vivre de ce discernement des esprits.

Alors pour donner un exemple fort ; quand Jésus se retrouve au jardin des Oliviers. Il dit qu’il est traversé par l’angoisse. Il est dans la prière. Il a à discerner quel est l’esprit du bien : où l’attire-t-il ? Et l’esprit du mal : où l’attire-t-il ?

Médiatiquement, on dirait que l’angoisse, c’est évident, c’est l’esprit du mal ! Alors que l’angoisse elle vient de ce qu'il sent, qu’il est appelé à donner sa vie, donner sa vie du côté de l’esprit du bien, ah oui ! C’est l’esprit du bien, il nous appelle à vivre du don de notre vie. Et quand l’esprit du mal vient mettre de l’angoisse sur le don de sa vie, il essaie de dire : "non, non, non, ne donne pas ta vie, tu te rends pas compte, tu vas te perdre, c’est trop risqué, préserve toi, quitte le jardin des Oliviers". Voyez, le discernement des esprits, il n’est pas de suivre son sentiment premier, il est de peser devant Dieu, la source de l’angoisse : elle vient d’où ? Elle me mène à quoi ? Et si elle me mène à refuser un don de ma vie, euh ! euh ! C’est peut-être pas,…voilà… Mais tout ça suppose que le regard intérieur se soit converti et que nos valeurs elles soient bien des valeurs évangéliques, c’est-à-dire : "j’ai compris que l’homme est créé pour donner sa vie et non pas vivre dans un barbelé avec une petite pancarte « Propriété Privée - Défense d’entrer ». Cette manière de vivre, fermée sur soi-même en ayant son petit trésor et loin de tout le monde, il nous est demandé de découvrir un peu à la fois que ça n’est pas vivre. Vivre, être vivant, c’est accepter d’être dans des relations, de les jouer, d’en être touché, d’en être blessé, de pardonner, de reconstruire, etc…

Alors, pour terminer, on peut se poser la question : quel est l’espace de liberté quenous avons ? A un certain niveau, il y a beaucoup de choses sur lesquelles on peut dire que l'on n’a pas d’espace de liberté, mais que la liberté suprême qui nous est demandée,qui nous est donnée, que nous avons à exercer c’est de dire, aujourd’hui, parexemple, je suis religieux, vous êtes mariés, y a un certain nombre de choses quisont du passé, qui sont établies, on est dans une culture, on est dans une famille, onest dans une histoire, il y a énormément de choses qui s’imposent. Par contre, làoù nous sommes libres, c’est la manière dont nous le recevons. Avec quel cœurnous le recevons ? Comment nous le regardons ?

Pour donner un exempledouloureux, je pense à telle femme issue complétement du Quart-Monde, famillecomplétement déstructurée, 3 enfants, une droguée, la prostitution qui se terminera par le suicide.

Dans les trois enfants, il y a des questions d’incestes,etc.…

Vraiment, j’allais dire un tableau… Vraiment, c’est du…plus noir que ça…

Et… une des filles, sa maman lui a dit et lui a redit : « je net’ai pas désirée et je ne t’aime pas ».

Voilà. Chaque Noël, les trois enfants seretrouvent, il y a des cadeaux pour deux et pas pour celle qui n’est pas aimée.

Donc, Il lui est répété dans son existence « toi je ne t’ai pas désirée, je ne t’aime pas. » Pour construire une existence, construire etc…. C’est… j’allais dire…       Ffff !...

La mère est décédée… les deux autres… Donc une s’était suicidée, n’existait plus, le troisième n’a pas voulu s’occuper de nettoyer le taudis, etc…

C’est celle qui n’était pas aimée qui a pris le temps de nettoyer le taudis. Et voilà que dans la cave humide, elle tombe sur deux grandes boîtes avec des quantités de cartes postales, de lettres, de la jeunesse et du début du mariage de sa mère. Elle a misun an avant d’oser ouvrir la boîte parce qu’elle savait qu’elle allait rentrer dans du glauque. Au bout d’un an, elle a commencé à lire et du coup le regard qu’elle a eu sur sa mère s’est progressivement converti. Elle a découvert que ce que, elle, elle avait subi, dans une relation impossible avec sa mère, sa mère l’avait vécu à la génération précédente dans des situations qui n’étaient pas exactement les mêmes, mais qui étaient tout aussi horribles, et elle a accepté avec son futur mari d’en dire un certain nombre de choses : elle a converti son regard sur sa mère. Ça veut dire qu’elle a pu et elle peut, parce qu’elle vit encore, j’allais dire la prier, elle peut la respecter, elle peut l’honorer. Notre liberté c’est de changer notre regard sur ce que nous ne pouvons pas changer, c’est de pouvoir dire du bien, du réel là où nous il nous semble qu’on ne voit pas du réel.

Quand Abraham entend la parole de Dieu qui lui dit « Va dans le pays que je t’indiquerai » il lui dit « je bénirai celui que tu béniras, etc… » ; c’est un échangede bénédictions. Et il va au pays de Canaan, c’est-à-dire le pays des maudits et il bâtit des autels, c’est-à-dire que, au cœur de l’humanité pécheresse, il dit que Dieu est présent. Notre liberté première c’est de croire dans notre humanité, de dire du bien dans notre humanité, j’allais dire de montrer aux autres, que oui, il fait bon vivre dans cette société. Nous avons plaisir de vivre avec nos concitoyens, nous ne sommes pas des hommes et des femmes de murmures, nous sommes des hommes et des femmes de bénédictions, et qu’à partir de là nous sont donnés des gestes, des paroles, des solidarités, j’allais dire le « que faire » devient quelque chose qui n’est pas un commandement, c’est-à-dire qui s’impose à nous de l’extérieur comme une loi, il devient une intimation au cœur, ce qui est très différent.

Dans la parabole du Bon samaritain, le prêtre, le lévite, passe à côté, le samaritain lui entend non pas un commandement au sens d’une loi mais il entend un commandement de l’amour, c’est-à-dire une intimation au cœur qui lui dit : "Mais enfin, vas-y », il ne va pas y passer sa vie, mais il s’est dérangé une demi-journée, il a payé la nuit à l’hôtel et il continue son chemin ! Mais il ne pouvait pas ne pas le faire. Ça s’imposait à lui. Il fallait que… Dans nos existences, j’allais dire le discernement des esprits, c’est de dire oui à cette intimation du cœur, à ce cœur converti, ouvert à l’autre et qui dit : je ne peux pas ne pas fuir cette situation-là ! Et c’est sans savoir, et il n’y a pas besoin de savoir. On ne vient pas avec son sac à dos avec tout ça, mais nous vivons une présence, une relation, une audace,…

Bon, bref, je pourrais continuer… mais c’est bien comme ça. On arrête.

Note d’édition : Ce texte est la transcription de l’intervention orale de Bruno Régent, captée par un magnétophone, et non reprise par l’auteur pour en améliorer la lecture.

 
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