Une trouÉe dans la forÊt, une lueur au bout du chemin,
une raison d’espÉrer.
Grenoble, 09 décembre 2010
11 présents
- Le CA des Pingouins auquel je viens de participer, la médaille reçue par Angel qui travaille dans les foyers de marins, l’accueil par les Parisiens…tout ce dynamisme en synergie avec les semaines sociales, pour moi c’est une lumière.
L’arrivée du petit Timothée dans le couple de notre fille est aussi une lumière : la façon dont le couple a géré le problème de la lèvre, la façon dont le père a suivi la grossesse, l’accouchement, l’opération… Le plus profond du mystère chrétien, de la vie, c’est aussi le vécu des hommes et des femmes.
- On est dans une époque très sécularisée marquée par une absence de Dieu, du Père. Je me demande quelle incidence sociologique et politique produit cette absence, spécialement quant à la libération de la violence. De plus, dans nos quartiers, nous vivons l’absence des pères. Pour cela nous avons pris contact avec quelques « sages » ou « cheveux blancs » appartenant à diverses communautés d’origine, spécialement du Maghreb, en vue d’une rencontre la semaine prochaine. La situation de lutte pour le contrôle de l’espace public, nous oblige ainsi à prendre des initiatives pour que les adultes jouent à nouveau leur rôle par rapport à la jeunesse. C’est une petite lumière dans une situation très dégradée.
- Pour l’instant je ne vois rien. La forêt est dense. Ma raison d’espérer n’est pas dans la vie, mais dans la fin de vie, même si l’on fait le maximum pour que la fin de vie soit la plus douce possible.
- Je n’ai pas du tout la même optique que mon épouse. Personnellement, je n’ai pas l’impression de fonctionner en voyant des lumières. Je ne vois pas de quoi on parle dans le thème proposé. Ce qui me fait avancer, c’est le fruit de ma réflexion, ce n’est pas une raison d’espérer, ce n’est pas une lumière, c’est d’avoir un objectif pour aider les autres.
- Une raison d’espérer à deux niveaux : la trouée dans la forêt me concerne dans la vie de tous les jours. Je me sens aidé par quelque chose qui me nourrit de l’extérieur. Ce n’est pas avec mes propres forces que j’arrive à assumer mes activités, la difficulté de vieillir en continuant à garder une activité sociale alors qu’on a envie d’arrêter pour bouquiner.
Lumière au bout du chemin. Je lis Le Commencement d’un Monde de Jean-Claude Guillebaud. On est décalé par tout ce qui se fait dans ce monde, mondialisation, communication. La société française est agressée par ce qui se passe à l’extérieur. Il y a des défis à surmonter très différents de ceux qu’on a eu à surmonter dans notre jeunesse. Teilhard de Chardin était le prophète de notre temps. J’ai aussi une lumière parce que j’ai la Foi, il y a une force intérieure. À Cancun, il y a une volonté du peuple derrière les conflits. La lumière, ce n’est pas un phare, mais on a confiance pour que cela aille dans le bon sens.
- Je vis une Foi confiante assez grande. Je lis Teilhard de Chardin. La déclaration des droits de l’homme est quelque chose d’extraordinaire. On ne peut pas torturer dans un pays sans que le monde réagisse. Mais dans les petits détails ??…
- Lumière en dents de scie. Comment font les profs dans ces zones sensibles, dans les classes avec des jeunes odieux ? Ce n’est pas ce qu’on vivait il y a cinquante ans. Mais il faut croire à l’Éducation. Je forme des professeurs d’école de maternelle et primaire : on peut vraiment aider les enfants déboussolés. Parfois, on voit des choses très sombres, et quelquefois on voit des lumières. Les naissances, c’est quelque chose de merveilleux.
- Avez-vous déjà marché dans une forêt alors qu’il fait vraiment noir ? Cela nous est arrivé, et on se rend compte que malgré l’obscurité, la forêt vit. Nous, dans le désespoir, on laisse l’esprit en sommeil ; avec la lumière on se réveille en sursaut et on marche de nouveau. Il faut savoir regarder les sourires. La lumière pour moi, ce sont les yeux compréhensifs de l’autre. Il y a communication si chacun de son côté fait un effort. La nuit même de l’opération de Timothée, un SMS nous a réveillés : « Timothée pète la forme, il fait des méga sourires, gigote dans tous les sens, mange bien, dort ou bien est éveillé sans pleurer. Que du bonheur ! »
- Ce langage ne me parle pas beaucoup. Je suis assez confiante de nature ; marcher dans une forêt profonde, je sais ce que c’est. Je prends la vie comme elle est. Je prends ce qui est positif, ce qui m’amène du bien. Je suis naturellement confiante. On peut s’inquiéter pour nos enfants, mais nos enfants ont d’autres ressources que nous pour trouver des solutions.
- Je pense la même chose. J’ai cherché dans ma vie quelle expérience m’avait mis en difficulté et comment je l’avais surmontée. Dans un contrat européen, après 18 mois de travail, un mois avant la présentation devant la commission, on s’aperçoit (entre nous) que tout est faux, ou plus exactement que la définition du produit était bonne, mais mal interprétée par le labo. Je venais de changer de service. J’en réfère à mes supérieurs. Stress maximum professionnellement, et en même temps à la maison où nous étions à un mois du mariage de notre fils. J’ai eu la chance que les gens qui avaient abandonné le projet, soient venus me voir et m’aient aidé, j’ai pu lâcher prise. Ma seule lumière à ce moment-là, était extérieure, quel que soit ce qui se passait au travail, il y avait au final le mariage de notre fils.
- Dans une forêt noire, il faut aller vers la lumière. Une raison d’espérer, c’est une raison de marcher. Pour moi, la lumière c’est quelqu’un, une référence, un modèle…mais je ne trouve pas « le guide », mais untel pour sa façon de faire dans le domaine professionnel, untel dans le domaine amical, untel qui sait bien coopérer… Parfois on peut se demander si la lumière est visible. Une nièce d’une vingtaine d’années est schizophrène ; on ne sait pas si elle va s’en sortir. Son père se sent responsable, non de la schizophrénie, mais de l’aider à vivre. Quelle lumière pourrait-on souffler pour que ça s’ouvre ? On peut se demander s’il y a une lumière pour tout le monde. On peut espérer qu’il y aura des médicaments qui l’aideront à vivre le mieux possible. En chacun, il y a toujours une petite fêlure sur laquelle on peut souffler.
- Je suis accompagnant d’handicapés en montagne. La présidente de l’association, elle-même handicapée, discute sur une personne handicapée qui n’a plus de lumière, ne fait plus rien. La présidente dit alors que ce qui la fait vivre, c’est d’avoir toujours de l’espoir de faire quelque chose pour les autres. Si on ne fait plus rien, c’est la dégringolade.
- Les mots du thème me plaisent, mais dans ma vie, je n’ai pas eu des moments trop sombres, trop longtemps. Moi je vois plutôt des petits vers luisants ; je ne me mets pas une lumière lointaine, un objectif lointain.
- Dans les funérailles, je parle de la lumière quand on est dans l’ombre, mais j’espère que Dieu parle pour moi. Lors de funérailles très récentes (homme ayant eu la maladie d’Alzheimer pendant 20 ans, et qui s’était arrêté de parler après 4 ans) sa femme a dit que n’ayant plus de vie sociale et ne pouvant pas regarder la télévision, ils marchaient beaucoup, en ville ; ils ont eu une proximité tous les deux qu’ils n’auraient jamais connue avec d’autres engagements.
- Après une réunion organisée par les amis du journal La Vie pour parler à froid des évènements de la Villeneuve, j’en étais sortie apaisée, mais d’apprendre le regain d’agressions physiques, m’a replongé dans le noir : ce n’est pas donné à tout le monde de savoir ce qu’il faut faire, moi en particulier. Mais même si je ne suis pas au cœur du quartier, je sais qu’il faut unir toutes nos forces pour réagir, ne pas fermer les yeux.
- L’une d’entre nous lit un extrait de l’Évangile de Luc :
« Le voilà, Il est ici. N’y allez pas, ne courez pas, en effet, comme l’éclair qui jaillit, Il illumine l’horizon d’un bout à l’autre ; ainsi le fils de l’homme, quand son jour sera là ».
Et elle conclut : être en chemin, c’est choisir la vie. Sois donc vivant !