Toulouse et Pays basque 

 

Donner partager recevoir TRANSMETTRE :

Ce qu'on m'a transmis ou ce que j'ai transmis ou pas...

 

Cesseras en Minervois 12/11/2017

11 participants 4 excusés

 

==== Je suis née en France, je suis blanche, on me dit « tu ressembles à ta grand-mère » que je ne connais pas et pourtant je transmets inconsciemment de la même façon ce que j'ai reçu.

J'ai reçu de mon père une force invincible pour rebondir et trouver des solutions à toutes situations, y compris professionnelles, (reprise des études, changement de métier à 35 ans) ; ma fille m'ayant eu comme exemple dans ces rebonds, est aujourd'hui (à 48 ans), assise sur les bancs de l'école pour se former et se reconvertir professionnellement.

Quand j'apprends quelque chose ce n’est pas que pour moi c'est pour donner, partager. Ce que j'ai reçu et trié, ce que j'acquiers aujourd’hui qui fait partie de mes centres d'intérêt, je le transmets : que reçoit l'autre, qui il est ? L'un sème l'autre récolte je ne suis pas responsable de la récolte.

 

==== Ce que je vis actuellement avec un jeune de 19 ans accueilli chez nous, ce que ça me fait vivre, à moi plus âgé ? Je découvre que j'ai des compétences, c'est la première fois que j'en prends conscience.

« Un jeune qui peut et un vieux qui sait » ça fait pas mal !

Mon objectif n'est pas d'en faire un charpentier, ce que je transmets, c'est des façons d'être, de regarder le travail, de s'organiser.

En lui montrant, je me rends compte que je fais naturellement des choses sans en prendre conscience.

Transmettre me fait prendre conscience de ce que j'ai reçu.

 

Avec les compagnons je sais que j'ai acquis le trait, le savoir géométrique et l'Orient, l'organisation, domaine que j'ai acquis peu à peu.

J'ai reçu, j'ai intégré, j'ai fait grandir et maintenant je transmets.

Même genre au niveau de ma foi, la foi est intransmissible et pourtant j'ai des choses qui viennent de ma mère, ma grand-mère ; c'est passé mais je ne sais comment.

La ressemblance avec ma petite fille alors qu’elle ne l’est pas génétiquement mais de cœur, transmission par la tendresse. La transmission est de l’intérieur vers l'intérieur.

J’ai gagné en sagesse, je veux dire que je ne me comporte plus comme celui qui sait par rapport aux autres. La fréquentation des jeunes m'amène à remettre en cause certaines de mes certitudes par exemple sur la sexualité, le genre. J'évolue beaucoup sur ces sujets.

En Terre Adélie, je me suis comporté comme celui qui sait, maintenant la fréquentation des jeunes me permet de me remettre en cause.

Qu'est-ce que les jeunes nous transmettent ? Je pense qu'ils nous transmettent beaucoup et nous bousculent dans nos réflexions.

 

==== 2 choses : la première, une phrase de ma maman « mon petit chéri tu feras ce que tu veux mais je vais te dire ce que j'en pense ».

Je suis le dernier de 7 enfants et je pense qu'elle a fait de même pour les autres enfants.

La traduction de cette phrase est la suivante :

Mon petit chéri = Je t'aime et tu m'aimes

Tu feras ce que tu veux = je respecte ta liberté

Mais je vais te dire ce que j'en pense = je suis ta maman ce que tu fais a de l'importance pour moi c'est pourquoi je te donne mon point de vue

« Je t'aime et tu m’aimes », voilà ce que je voudrais te transmettre.

C'est quelque chose que j'ai utilisé avec mes enfants, j'ai essayé, j'ai pas mal réussi.

Deuxième chose, il y a quelques années, on a reçu un message très fort de Jean VOLOT, « après ma mort, il faut faire quelque chose pour dire qu'il y a des repères ». Ainsi avec une petite équipe, nous avons sorti le livre intitulé

« Repères ».

J'ai fait un témoignage, son titre est : « garder le CAP », c'est un peu compliqué dans ce monde en totale mutation et avoir des repères est bien utile.

CAP est un acronyme : C Comprendre - À aimer - P Prier

Dans l'échange avec l'autre, comprendre me paraît indispensable. Pas de progrès sans la volonté de comprendre, se comprendre.

 

Aimer m'est un repère fondamental. Je ne suis pas habile pour en parler, mais j'ai à l'esprit le commandement de jésus : Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimé. Il ne définit pas ce qu'est aimer ; mais il rappelle seulement comment il a vécu et tout est dit.

Prier : Je constate que je ne peux pas tout comprendre, qu'il n'est pas évident de s'aimer les uns les autres. Ma prière est un repère pour comprendre et aimer.

Prier, moi ça m'aide j'espère que ça aide d'autres personnes.

Il existe une connexion forte entre transmission matérielle et non matérielle à développer.

La transmission matérielle est une bombe...

Le matériel est fortement connecté à ce qui ne l'est pas...

 

==== Impression d'une continuité : on est là et on ne sera plus là. Je ne crois pas à une religion particulière, mais je suis catholique par ma famille.

Ma tante qui avait de l'or dans les mains, elle était couturière, m'a beaucoup transmis. C'est vrai que le côté manuel qu'on m'a appris, est un moyen pratique d'entrer en communication avec les gens, les petits-enfants.

La communication est différente quand on fait les choses ensemble.

Ce côté manuel passe aussi aux enfants et petits-enfants :

  • un de mes fils qui coud ses chaussures,
  • les petits filles, très loin : « on sait que tu raccommodes, tricotes » !

Ils nous voient faire et ça donne envie.

On se rend compte que nos enfants sont avec leurs ados comme on a fait avec eux. L'exemple dans la façon de vivre, d'être, se transmet sans dire, un jour ou l'autre ils sont imprégnés de ça.

Je pense que la trace se fait plus par la façon d'être qu'en disant ou martelant des choses.

Notre façon de vivre se voit (gestes écolos) même si on ne fait pas tout bien.

 

==== Je suis assez d'accord sur tout ce qui a été déjà dit. Mais je voudrais m'arrêter sur la transmission et la rupture : il y a ce qu'on a reçu de nos parents mais aussi des idées qui viennent de nos enfants qui parfois nous dérangent. Rupture ou pas ? Nous, avec nos propres enfants, je trouve qu'il y a quelques « Hic » entre ce qu'on aimerait leur transmettre et leur façon de faire, de penser avec des bémols par rapport à ce qu'ils ont reçu.

C'est plus un ressenti de différence de génération; il y a certaines avancées de leur part, mais aussi des reculs. Même si on n'adhère pas, c'est peut être ça qui fait avancer le schmilblick (Guy Lux).

Nos petits enfants devant la télé... c'est quand même bien pratique quelquefois. Un petit-fils qui demande un téléphone car il n'y a plus de cabine téléphonique dans les collèges. Sans compter encore les ordis, même si chez nos enfants c'est encore un peu en retenu. Pour combien de temps !!!

C'est aussi la société qui change : pour ce week-end du 11 novembre, on a traversé des villages, vu des voitures mais personne dans les rues. Il y a 50 ans ou plus, il y avait du monde dans les rues de village, et la célébration du 11 novembre était très importante avec de nombreux participants.

 

==== J'ai l'impression que la plupart de ce que j'ai pu transmettre c'est inconscient. La partie consciente est la plus faible.

Pour moi la religion amène beaucoup de valeurs auxquelles j'adhère mais dire que j'ai la foi, non.

Dieu me manque, je ne me sens pas capable de tout maîtriser. J'ai toujours besoin d'une référence, un père, un pilote, j'aimerais synthétiser sur le papier.

Je sens avoir besoin de quelqu'un référent au-dessus de moi, même dans le boulot. C'est tout à fait compréhensible d'avoir quelqu'un qui nous donne des repères au-dessus de nous.

 

==== Passion que j'ai reçue vers 15 ou 16 ans. On était en Agde, une personne âgée qui avait une entreprise de chaudronnerie et avait la passion des armes et du tir. Personne habile, capable de construire une arme de A à Z. Je passais mes week-ends à gratter de la ferraille, du bois. J'ai appris beaucoup de choses, il était passionné, c'était l'armurier bénévole du club de tir. Il aimait transmettre sa passion aux jeunes, l'amour des belles armes, un savoir-faire. Ça m'a marqué profondément.

 

==== J'ai trouvé le fil, c'est vous qui me l'avez donné, ça commence par le don, c'est la vie ! Ça revient de loin.

Une statuette en ivoire a été retrouvée, elle mesure 4 cm : c’est la Dame de Brassempouy (vers 23000 av. J.C) ; certains l'on vue à la maison. J'ai essayé de la reproduire en sculpture, avec ce regard sur un avenir qui ne nous appartient pas, un passé qui est entré en nous et le quotidien qui nous demande d’accueillir et de transmettre. Pour moi c'est actuellement très très fort.

On est enfin grands-parents et n'avons plus de nombreuses années à vivre.

Il est urgent de transmettre, non dans la précipitation mais dans l'amour. L'enfant prend ce qu'il veut dans ce qu'on lui transmet.

Quand quelqu'un vient, que ce soit le petit qui vient de naître ou celui qui vient jusqu'à nous ; je dis encore merci à ce jeune homme, « on t'a donné l'hospitalité et toi tu nous as donné bien plus ». J'ai repris la sculpture. Avant j'étais dans l'urgence.

Jusque-là j'avais pompé de ma mère et j'ai reçu énormément de mon père, c'est maintenant que je le mesure. C'est tellement important pour moi qu'il faudrait que je me mette à l'écrire. Et là l’émotion me saisit.

 

==== Je m’en rends compte aujourd'hui : j'ai été un peu une éponge.

Ce que je suis aujourd'hui, c'est un tas d'influences.

Né dans une famille chrétienne, j'ai été élevé dans la peur du péché mortel. La peur de l'enfer a habité mon enfance pendant de nombreuses années.

Pendant mon service militaire (28 mois), j'ai été très marqué par la rencontre de français différents de moi au niveau intellectuel.

À Rome je me suis formé ou déformé par l'enseignement reçu. Par thèse ou contre thèse où on apprend à répondre à ceux qui sont contre notre foi chrétienne. Je me suis révolté contre cette formation où on ferraillait par contradiction.

 

En navigant comme simple matelot j'ai rencontré une autre population, des matelots qui s'exprimaient avec peu de mots mais disaient des choses fortes.

L'éponge a continué à piquer des choses y compris la capacité du doute. « Depuis que j'ai appris que le doute fait partie de la foi, je pense devoir être un grand croyant, qu'est- ce que je doute »

Réflexion : qu'est- ce qui nous a modelés de ce qu'on a reçu ? Il faut faire le point aujourd'hui.

Un soir après une période de non communication, j'ai pu parler avec ma fille.

L'éponge a été imprégnée de la rencontre de l'amour d'une femme très concrète et artiste.

 

==== Sur les quatre thèmes, je mets le curseur sur partager et transmettre.

Je l'analyse d'après mon expérience sans faire trop de théorie.

Pour moi la vie c'est du cinquante-cinquante : comme ma grand-mère Hélène j'aime cette convivialité du partage. J'aime le contact avec les gens, j’adore parler ; ça permet une connexion extrêmement riche. « Je fais de la transmission comme Monsieur Jourdain faisait de la prose ».

L'expérience de Kerguelen a été extraordinaire, je sortais du fond de mon bled, les études à Paris m'avaient ouvert les yeux, l’explosion scientifique, les micro-processeurs. On avait l'impression de vivre sur une autre planète et j'étais malheureux quand je rentrais en Corrèze : mes parents faisaient les foins et moi je créais des programmes. J'étais une cocotte-minute car je ne pouvais pas m'exprimer ; c'était mal vu.

 

Les Kerguelen, je m'éclatais, j'installais... J'avais appris des choses, je pouvais transmettre. Dans ma vie professionnelle ultérieure, j’insistais toujours pour avoir un stagiaire ; « Vous avez trop de boulot? Partager, prenez des stagiaires ! ». Ça oblige à bien poser les problèmes et mettre les yeux devant les trous. Ça vous force à expliquer les choses donc à les maîtriser. C'est un partage, il faut partager ses connaissances, ça me passionne. Je continue un peu mais je n'écrirai pas de bouquin.

Transmettre ? Je me rends compte que les jeunes sont sur une autre planète.

La transmission matérielle, c'est mon gros truc du moment, des trucs qui peuvent servir...

Je me dis « J'y tiens à ce truc mais pas plus que ça »... et pourtant il faudra bien que tout ça disparaisse ou se disperse.

J'ai assisté à une ou deux situations où les personnes disparaissent et la maison est désarmée, ce sont des choses inertes mais qui ont vécu et d'un seul coup tout passe au broyeur. Je m'attache à avoir une gestion propre, il ne pleut pas dans la ferme de mes parents. La messe est dite.

 

==== J'ai beaucoup aimé ce que vous avez dit, j'ai beaucoup de chance d'être là.

Pour mon hôte le fait de me transmettre lui fait prendre conscience de tout ce qu'il a et moi j'ai le bonheur de découvrir que c'est bon de recevoir.

Ça fait du bien de se sentir une éponge (19 ans) de tout ce qu'on peut recevoir bon ou moins bon. On a d'office quelque chose à partager.

Question : Qu'est-ce qui t'a donné envie de partir sur la route ? Tes parents ? Réponse : Non. Ma famille non plus. Personne ne m'a fait partir. Je me sentais un peu dans un monde vide.

Quelqu'un du groupe parlait de la transmission inconsciente ; dans l'amour reçu de mes parents, j'ai ressenti une force qui m'encourageait à partir et quelque part ça leur faisaient plaisir.

 

===== Transmission par la façon de vivre de mes grands-parents maternels. Pas besoin de mots. Mon grand-père était beau ; c'est ma grand-mère qui lui a appris à lire et écrire. Une vie de couple harmonieuse au service de chacun.

C'est chez eux que j'ai fait le plein de belles choses culturelles aussi, mon premier voyage hors de France.

Avec Roger, je suis dans cette même démarche, être en communion tout en étant chacun ce qu’il est !

De mon père j'ai reçu la persévérance, la rigueur et l'honnêteté, pas de grands discours ; rupture au niveau de la religion, c'est son histoire. J'ai cicatrisé en retrouvant ce cheminement avec mon époux.

De ma mère j'ai reçu la joie, l'autorité et la confiance « Quand tu fermes les yeux le petit Jésus vient t'embrasser ».

Pour moi la transmission se fait essentiellement par amour, c'est un acte gratuit. Quand je vois maintenant notre fille en couple, j'en prends conscience.