RIEN
Porquerolles, 23 et 24 avril 2016
9 présents
Le thème me fait penser au livre d’un ermite où un chapitre est intitulé « rien du tout ». J’en déduis que le tout est indissociable du rien et que tout est utile dans le monde. Je suis très préoccupé par le « tout » de gens qui subissent plein d’épreuves, alors que depuis ma naissance j’ai tout reçu, sans moments de vide. J’ai eu la chance de ne pas avoir eu de rapports avec le « rien ».
J’aime la situation de ne rien faire, comme contempler, par opposition à une activité physique. Ne rien faire me fait ressentir que je suis un élément de l’univers, donc du « tout ». La méditation m’aide à calmer le mental. J’aimerais parvenir à un niveau de méditation qui me permettrait d’appréhender le « tout ».
J’ai du mal avec le mode contemplatif. Il m’est difficile d’être inactif, mais le sport et le jardinage me permettent parfois de ne penser à rien. L’exercice me paraît quand même compliqué. Je peux vivre avec quasi rien, avec seulement confort minimal et suffisance alimentaire. Ça me ramène à l’essentiel et c’est sympathique. Notre fils a renoncé à des écoles de commerce où il était admis, pour redoubler et avoir mieux l’année suivante. Il risquait de n’avoir rien pour viser le tout, et a réussi. Il nous a ainsi donné une leçon. J’imagine mal qu’il y ait quelque chose après la mort. Les morts sont dans mon cœur, mais je pense qu’il n’y a rien derrière.
L’anagramme de rien est « nier ». « Rien » conduit à la négation. J’ai peu de besoins pour vivre, mais ce n’est pas rien. Je ne peux pas rester à rien faire. « Tout ou rien » ne signifie pas grand-chose pour moi. Un tout petit peu peut créer une grande joie, comme contempler la montagne à perte de vue. Quand on a gravi la montagne, on n’a pas gagné de biens, mais une grande satisfaction. Être suicidaire, c’est ne plus avoir de raison de vivre : le rien est un non sens.
J’ai beaucoup de mal à ne rien faire, mais il m’est arrivé de jeûner pendant une semaine : je me suis senti très bien au bout de deux jours et j’ai redécouvert les bons aliments à la reprise. Après quelques années de travail, j’ai eu quelques minutes de « rien » au yoga. J’en ai ressenti un grand bien-être intérieur.
« Rien » ne comprend pas la négation, c’est quelque chose qu’on ne comprend pas. « Rien » est toujours une référence par rapport à une échelle de valeur. Puisque rien c’est rien, on ne peut pas en manquer. À un ami qui disait : « Je ne peux pas lire un livre qui ne sert à rien », j’ai répondu que l’art et la beauté ne servent à rien, mais sont vitaux. Je peux parler de rien ou ne pas parler quand je suis mal à l’aise, ou quand je sais que ça ne fera pas avancer.
Rien, c’est une quête éperdue. Je cours après et il me manque. J’aime l’état de relâchement, les WE où il n’y a rien à faire. Malheureusement je me sens submergée par les activités et les contraintes et me demande ce que j’ai fait. J’ai cependant connu des moments de bien être avec sensation de vide. Je peux mettre la radio la nuit pour me détourner de mes soucis. Aller dans une église vide me met en paix, par le dépouillement et la perception de l’esprit de Dieu. J’aimerais faire le vide dans la maison, mais mon mari la remplit. L’idée d’être enterrée après ma mort me cause un sentiment d’étouffement. Je ne veux pas être enterrée.
Le rien n’existe pas car j’adore ne rien faire. Être assise sur une chaise, ce n’est pas rien car le monde tourne, ma biologie fonctionne. Je fais plein de choses quand je dors. Dans la mort, il y a un cycle qui se perpétue et la mémoire du défunt chez ceux qui restent. Être inactif régénère, ce n’est pas rien. Tout est question de critère et de repère.
Un jour lointain, je me suis surpris au volant de ma voiture à constater que je ne pensais à rien, et je me suis alors dit que j’avais un problème. Aujourd’hui je sais que ça n’en est pas un. Quand une conversation m’ennuie ou m’agace, je ne dis rien. J’ai une tendance à l’hyperactivité, mais j’essaie maintenant de me laisser des périodes de repos, et de lâcher prise. J’y arrive, mais ne suis pas toujours convaincu du bienfait. J’ai une certaine faculté à ne pas voir ce qui me dérange. Je crois qu’il y a quelque chose après la mort, mais je suis peut-être comme d’autres, qui croient parce que l’idée qu’il n’y a peut-être rien leur est insupportable.
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LES VALEURS QUE J’AI DÉCOUVERTES CHEZ L’ÉTRANGER,
CELLES QUE LE LUI AI APPORTÉES.
Porquerolles, 23 et 24 avril 2016
9 présents
Je me souviens de 2 guides qui travaillaient pour leur famille, et pour construire leur maison. L’un était Kenyan, l’autre Népalais. Le Kenyan était calme et posé, et le Népalais était dur à l’effort. Au Népal, je me souviens d’une petite fille que j’avais soignée (elle avait de la fièvre). J’avais ramené des médicaments, et j’ai eu l’impression d’être un grand manitou, en parvenant à soigner cette petite fille. Au Québec, j’avais noté la gentillesse des gens, leur ouverture, l’entraide, et toujours avec le sourire. Beaucoup plus jeune, j’avais rencontré des Israéliennes qui nous racontaient qu’elles faisaient leur service militaire (2 ans) et qui trouvaient cela complètement normal, d’être au service de leur patrie. Aux USA, j’ai été surpris par le culte de l’argent (« save money » ou « earn money »). Au Japon, nous avons eu peu de contacts « non commerciaux ». Mais j’ai tout de même pu me rendre compte des valeurs de savoir vivre et de ponctualité, ainsi que de la « zénitude ».
Le Japon est une terre de contraste. Nous avons eu un contact non commercial au Japon : quelqu’un nous a fait faire un tour à vélo, et une dame nous a fait rentrer chez elle et nous a fait visiter. Cet échange était assez sympa. En Italie, une chose m’a surprise : leur sens de l’hygiène et de la propreté. Tous les jours, après le repas du midi, tout le monde se lavait les dents. Il y avait aussi une notion de respect. Quelqu’un sortait une liasse de lires, et il les donnait. Cette personne faisait cela assez fréquemment. Les derniers étrangers que j’ai rencontrés, ce sont les Corses : avec les enfants, nous avions loué une maison de village à Vico. Les gens nous donnaient des croissants. Il suffisait d’être humble, et cela se passait très bien. Toujours en Corse, à La Porta, il y avait une vie de groupe et d’entraide, sympathique. Même dans les villages aux alentours, j’ai ressenti cette entraide, avec une personne âgée qui m’a aidé à faire fuir un taureau.
Aux îles Comores, à 11 ans, je m’ennuyais un peu et je jouais avec les jeunes Comoriens. L’un d’eux avait un beau lance pierre. Je lui ai demandé « tu me le donnes ? ». Il me l’a donné, alors qu’il n’avait rien, et que moi, je vivais dans une belle maison et j’avais beaucoup de choses. Lui, avait juste un short et son lance pierre. C’est quelque chose qui m’a interpellé. Il m’a appris le don, et le don de quelque chose à laquelle l’on tient beaucoup. C’est quelque chose qu’il m’est ensuite arrivé de faire, que de donner quelque chose à laquelle je tenais beaucoup, à quelqu’un d’important pour moi. Ce jeune Comorien m’a donné une leçon de vie. Pour moi, il a été un ambassadeur de l’océan Indien et de toute l’Afrique.
En Afrique, on retrouve aussi cela dans le sourire des gens, si on fait preuve d’humilité. Si l’on est hautain, l’on sentira leur souffrance et leur mal être. C’était important pour moi que ces gens me transmettent ces valeurs qui ont tendance à se perdre en Occident. Ce thème m’a permis de réfléchir à mon statut de métis : j’ai une mère corse (de père et de mère corses). Je partage la culture corse et les traditions de ma région. Je comprends la plupart des nombreux codes. Je me sens parfois profondément Corse, mais parfois « Pinsuntu » (étranger). Il y a des choses que j’ai faites miennes, dans la tradition et les valeurs corses. D’autres choses me posent problème, comme le rejet apparent des Arabes. C’est quelque chose que j’ai du mal à comprendre. Mes amis corses le ressentent, même si nous n’en parlons pas. Je me rends compte maintenant que j’ai un rôle important en tant que « métis » : je peux parfois, sans vraiment m’exprimer, leur renvoyer des choses qui les font réfléchir, et qui peuvent leur faire revoir leurs positions. C’est pour moi un échange de valeurs très important.
Ce thème sur les valeurs m’a fait penser que, pour moi, un étranger, c’est quelqu’un qui ne partage pas mes valeurs (le respect de l’autre, le refus de la loi du plus fort, …). L’un d’entre nous disait « l’enfer c’est la haine ». Cela m’a montré que des valeurs importantes peuvent être partagées avec des étrangers. Dans mon travail, j’ai une collègue étrangère. Elle fait beaucoup de choses comme moi. Elle a un enfant comme moi, mais je ne partage pas ses valeurs. Je me suis rendu compte que c’est moi qui ai mis une barrière entre elle et moi, car je ne me sentais pas proche d’elle. Je sais que ce n’est pas bien, mais je n’ai pas eu envie de faire cet effort.
Pour moi, l’étranger, c’est celui avec qui je n’arrive pas à communiquer. Mais, même s’il y a la barrière de la langue, cela ne veut pas dire que je ne vais pas arriver à communiquer. En Pologne, nous arrivions à échanger ; alors qu’il y a des gens, dans mon travail, ou dans ma famille, avec qui je ne parviens plus à communiquer. Ma sœur est devenue une étrangère à mes yeux. Nous ne sommes plus arrivés à communiquer avec elle suite à un malentendu. J’ai connu des sourds muets, des autistes, avec qui je suis parvenu à communiquer, et qui m’ont fait découvrir des choses. Les Néo-Zélandais sont très accueillants. Ils sont ouverts. À un moment, un Monsieur m’a conseillé d’aller à un endroit particulier, sur une plage à marée basse. Il m’a donné une pelle pour faire un trou, de façon à faire une baignoire, dans une résurgence d’eau chaude.
Je me suis donc retrouvé dans une baignoire d’eau chaude avec plein d’étrangers, qui creusaient aussi leur trou, et qui venaient de divers endroits du monde. L’eau était à 80 °C. Pour moi, tous ces gens de nationalité différente n’étaient plus des étrangers. Ces gens m’ont appris plein de choses sur leur pays. À la maison, comme nous étions 7 enfants, nous avions des jeunes filles qui nous gardaient. Une Suédoise nous faisait des gâteaux et nous racontait la culture de son pays. Nous avions aussi une baby sitter hollandaise. La vie en Hollande est très enrichissante. Nous avons notre manière de vivre en France, mais nous pouvons aussi prendre d’autres manières, venant d’autres pays. L’émission « Voyage en terre inconnue », avec Clovis Cornillac, en Chine : je voyais ces gens qui parvenaient à communiquer, avec le sourire. Je trouvais ça formidable. Découvrir le pays, c’est bien, mais découvrir les gens, c’est très important.
Côte d’Ivoire : j’y allais un mois, pour les vacances d’été, dans les années 60 à 80. Ce qui m’a marqué, ce sont les gamins joyeux, pauvres, qui jouaient avec de simples objets. J’ai été marqué par cette jovialité ambiante et cette simplicité. Plus tard, nous sommes allés dans la brousse, avec un bus du Club Med. Une femme touriste était vêtue de façon extravagante. Les Africains avaient du mal à comprendre cette extravagance. J’ai passé 3 mois en Alabama en 1978. J’ai été confronté à la civilisation américaine.
C’était difficile, au niveau professionnel, car je ne comprenais pas grand-chose. Ce qui m’a marqué, au début, c’est le fait que je ne pouvais pas partager de repas avec eux ; alors que pour moi, le partage du repas était quelque chose de très important. Après, je me suis adaptée à leur rythme. Ce qui m’a troublé, aussi, c’est qu’il n’y avait pas de centre ville, ni de vie citadine, de vie sociale.
Il y avait bien des gens sympas… J’ai organisé des repas. Je leur ai amené cela. J’avais fait un lapin à la moutarde, mais là-bas, le lapin est considéré comme un animal domestique. Dans le milieu professionnel, et la connaissance de la culture maghrébine, j’avais une collègue marocaine très compétente, mais avec qui ça ne passait pas très bien, au début. Un jour, elle était à bout de nerfs. Je suis alors rentrée dans sa sphère, pour essayer de l’aider. Elle trouvait qu’une certaine personne lui parlait comme à un larbin. J’ai essayé de l’aider en lui faisant comprendre que c’était là sa vision des choses, mais que ce n’était peut-être pas la réalité. Elle m’a expliqué que cette personne lui renvoyait l’image de sa propre mère, qui avait été un peu l’esclave de ses beaux-parents, après s’être mariée. Cela m’a fait beaucoup réfléchir. Ce que j’ai transmis comme valeur, je ne sais pas trop.
Je suis déçu, car j’ai trouvé le thème très beau et très riche, mais je crois que je ne vais pas apporter grand-chose. Nous avons fait beaucoup de tourisme « voyeuriste », avec des relations commerciales. Donc, je n’ai pas grand-chose à dire là-dessus, sauf peut-être, un tour d’une semaine que nous avons fait dans le désert. Un soir, nous avons eu une discussion sur la famille, avec notre guide. Je lui ai dit : « Chez vous, le sort des femmes, c’est pas terrible ». Il m’a répondu : « Chez vous, le sort des vieux n’est pas terrible ». Lorsque nous sommes allés en Bretagne, nous avons vu des gens qui sont différents des gens que nous voyons à Marseille.
Ces gens-là ont de la valeur pour moi, et je me trouve mieux avec eux, qu’avec les gens du sud-est. Politesse, esprit de service, respect, même si ces gens peuvent être un peu « rugueux ». Nous avons fait l’expérience d’un placement. Il y a eu un problème, mais je me suis dit qu’il n’y avait pas de volonté d’embrouille de la part du vendeur. Je crois être porteur de valeur de justice, d’équité, de respect de la sphère de chacun. Il y a des comportements type « Europe du Nord », et d’autres types « Europe du Sud ».
Je pense que je suis « Europe du Nord », et les gens type « Europe du Sud » m’agacent énormément. Quand je vois des gens qui magouillent, ou qui sont sans gêne, ça me donne envie de leur voler dans les plumes. L’autre jour, à une station service, une personne a laissé sa voiture au milieu, pour aller faire ses courses. Je suis allé lui dire qu’il était mal garé. Il n’était pas content. Je lui ai dit : « En tout cas, je vous ai dit que vous gêniez ». Bien souvent, je réagis à une émotion, et je peux être agressif. Un conducteur de VTC UBER garé près de chez moi, belle voiture noire et costume classe, a craché et jeté son mégot par terre. Dans ce cas, je ne lui ai pas fait de remarque.
Quand j’étais jeune, j’avais une notion bienveillante de l’étranger : ce qui était hors de chez moi, hors de ma région, c’était mieux. Lorsque je suis allée en Afrique, j’ai trouvé les gens accueillants j’avais une démarche bienveillante. Les gens faisaient attention à moi, et moi, j’ai échangé avec eux. Je suis allée en Allemagne, et j’ai trouvé les gens bienveillants également. Lorsque je suis allée en Loraine, chez mon époux, pour moi, c’étaient aussi des étrangers que j’ai trouvés bienveillants. Maintenant, pour moi, l’étranger, c’est quelqu’un que je ne comprends pas. Je n’aime pas l’Autriche. Lors d’un voyage en Autriche, avec mes parents, j’ai effleuré, en ouvrant ma portière, la voiture d’à côté, et le conducteur m’a hurlé dessus. Mes parents se sont aplatis, et se sont excusés. En Autriche, il faut suivre la règle, tout est au cordeau.
Là, j’ai physiquement senti que j’étais étrangère. Après, les choses ont évolué, nous avons beaucoup voyagé. J’ai toujours gardé ce côté bienveillant, et ce désir de partager avec des gens de pays différents. Nous sommes différents, mais nous arrivons à communiquer. Au Pérou, notre guide parlait à la nature. Il avait la volonté de communier avec la nature.
Les endroits qui ne m’ont pas plu : en Malaisie, ou en Turquie, avec les femmes voilées, et les hommes qui me regardaient, avec une forme de mépris, car je n’étais pas voilée. Là, je n’ai pas du tout ressenti la compréhension et le partage. En Indonésie, c’était un peu plus ouvert, et je l’ai moins senti. Je me suis dit que j’aurais du mal à vivre dans un pays comme la Malaisie ou la Turquie. En Afrique, au contraire, j’étais parvenue à avoir des relations. Lorsque je sors de chez moi, dans d’autres régions, j’ai l’impression que je suis à l’étranger. Peut-être que je me « rabougris » en vieillissant. Maintenant, pour moi, l’étranger est quelqu’un que je n’arrive pas forcément à comprendre, et avec qui je n’arrive pas à parler ; et pas obligatoirement quelqu’un qui est en dehors du pays. À Orléans, j’ai été choqué par quelqu’un que je trouvais magouilleur dans son travail. Je garde de l’étranger, de celui qui vient d’en dehors de nos frontières, une richesse énorme.
J’ai une expérience récente avec des étrangers du coin. J’étais aux îles de Lérins, avec mon bateau, mais j’ai perdu les clés de mon bateau, et je ne pouvais plus démarrer. J’ai demandé de l’aide. Quelqu’un de sympathique m’a prêté son téléphone portable, et j’ai pu appeler mon épouse. Un autre bateau est passé : c’était un couple de personnes âgées, qui m’ont ramené au port en me remorquant. Arrivé au port, un autre couple m’a aidé. Ensuite, j’ai fait du stop, pour récupérer ma voiture. Le fait d’être en faiblesse, d’avoir eu un problème, m’a fait rencontrer des gens très sympathiques. Autres rencontres que j’ai faites avec de « vrais » étrangers : je suis parti à 18 ans à Alger. Mon père m’avait donné l’adresse d’un ami à lui, à Alger. Je n’ai pas trouvé cet ami à mon arrivée à Alger. Dans le bus, j’ai sympathisé avec 2 Français.
Nous étions en plein Ramadan : il n’y avait pas un seul hôtel de disponible. Je me suis retrouvé avec un groupe de 6 personnes, pour essayer de trouver un logement. Nous sommes retournés à l’aéroport. Je suis ensuite retourné voir un autre ami de mon père. J’ai alors été super bien accueilli par cet ami de mon père. Par contre, j’ai préféré rentrer. Mais j’aurais pu rester. J’ai sans doute eu un peu peur.
Les deux derniers voyages que nous avons faits en Bolivie et en Israël : il n’y a eu aucun échange avec les étrangers de ces pays. Je me suis sentie très étrangère. L’étranger, c’est « l’autre », qu’il soit Bolivien, ou bien qu’il vienne de la Côte d’Azur. Ce qui m’empêche d’aller vers l’autre, c’est moi, ce sont mes peurs, la peur d’être jugée. Il y a deux choses marquantes que j’ai faites avec l’autre. La première chose, est que je donne des cours à des jeunes (génération Z).
Ces jeunes sont à l’opposé de ce que je suis. J’ai donc eu un peu peur de cette génération, dont on dit qu’elle n’a pas de respect pour l’autre. Je les trouve finalement hyper ouverts, et hyper respectueux. J’ai décidé de leur apporter tout ce que je pouvais, et qui faisait partie de moi. À chaque cours, nous faisons 6 minutes de méditation. D’autres s’en foutent, mais d’autres aiment bien. Je sens qu’il se passe quelque chose ; certains jeunes aiment beaucoup. Aller à la rencontre de l’autre, c’est transcender mes peurs, et oser dire qui je suis. La deuxième chose, c’est avec mon propre fils, avec qui la communication n’est pas facile. Nous avons des valeurs opposées.
Les valeurs que je porte, moi, c’est « j’essaie d’être heureuse ». Lui m’a dit qu’il ne serait jamais heureux, que ses valeurs à lui c’est d’être parfait. Ne pas aimer l’autre tel qu’il est… J’aime mon fils plus que tout. Mais je n’aime pas mon fils avec ses tensions internes, tel qu’il est. Je me suis rendu compte que je n’aimais pas mon fils tel qu’il est. J’ai un échange profond avec mes étudiants, qui prennent mes valeurs, mais pas avec mon fils, avec qui je ne partage pas mes valeurs. Je fais un chemin avec lui, et ça me permet de « lâcher ». Pour le voile : une fille est voilée à Polytech’ (elle porte un foulard). Je me rends compte que ça indiffère tout le monde. C’est ma perception. J’ai l’impression qu’ils n’en ont rien à péter.
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