TOULOUSE ET PAYS BASQUE
LES LIMITES NATURELLES
Toulouse, 8, 9, 10 novembre 2014
12 participants
Nous venons de rencontrer un cousin qui a eu 7 enfants alors que le fort risque de handicap était posé. Plusieurs sont décédés ; un survivant est gravement handicapé. Quelle est la limite entre l’accueil du handicap et l’eugénisme ?
Me concernant moi, en retraite, je souffre d’un sentiment d’incapacité à l’initiative.
Ce que je vais dire ne va pas plaire à mon mari ; je ressens aujourd’hui deux problèmes, beaucoup plus qu’avant :
La langue basque que je ne maîtrise pas ; je vais de moins en moins à la messe qui est de plus en plus en basque – à la réflexion, je ressens une résistance à ce propos par peur de perdre mon identité, ce qui ne m’empêche pas de militer pour la langue basque.
La vie à la campagne car je n’ai pas le permis
Je me culpabilise aussi de n’avoir pas agi sur ces deux problèmes alors que nous vivons là depuis 30 ans ; il faut dire que j’avais d’autres préoccupations.
Je me sens surtout concerné par les limites imposées par la santé : il y a 4 ans, j’étais en fauteuil roulant sans être sûr d’en sortir. Je suis heureux de pouvoir marcher un peu.
Je me refuse aussi à ne pas me bagarrer pour aller plus loin.
Je suis en balance permanente entre acceptation et combat.
Ce qui me préoccupe le plus, ce sont les limites géographiques : les enfants sont loin. Ils nous demandent moins les services que nous préférerions pouvoir leur donner.
En ce qui concerne l’eugénisme, un cas m’a interpellé, que je ne me permets pas de juger : Une jeune femme, de famille profondément catholique, est enceinte d’un quatrième. À la première échographie, une trisomie est détectée. Elle réfléchit à la situation de l’enfant quand ses parents vieilliront, à la charge qui pèsera sur d’autres qui ne l’auront pas choisie. Elle choisit l’avortement et c’est sa mère qui la conduit à la clinique.
Quant à moi, ce sont les limites dans le temps qui me frappent. Quand on est enfant ou jeune, on ne les ressent pas. Aujourd’hui, je prends conscience de ma disparition un jour ; bien que bon vivant, je pense à la mort tous les jours. Je prends aussi conscience de ce que mes enfants et petits enfants auront à vivre.
Comment peut-on dire qu’il faut relancer la consommation ? Il est beaucoup plus confortable de vivre sans considérer les limites. Je vous recommande la lecture du livre « l’enfermement planétaire ».
Je vis une expérience unique pour moi : je quitte la vie professionnelle ! J’y ai beaucoup pensé, ayant vu tellement de gens qui rataient cette sortie. J’ai aussi vu des gens poussés au bout du couloir, rendus invisibles dans l’entreprise. J’ai vu aussi des gens qui ne voulaient pas y penser. Chaque année, à la nouvelle année, je prépare un petit texte pour mes collaborateurs ; depuis deux ans, j’ai voulu être clair sur ce départ pour que des projets ne soient pas bloqués par de l’incertitude. En parler c’est bien, mais partir, c’est difficile. Passer en un jour de 80 messages par jour à 0 : j’ai peur du premier mois, d’autant que j’ai sacrifié beaucoup de choses au profit de ma vie professionnelle.
Ma belle fille a 4 enfants dont un handicapé et un sous surveillance continue. Nous nous senton sentons incapables de les prendre en charge pour lui permettre de partir en voyage à Rome. Son entourage n’a pas, non plus, compris qu’elle ait été au bout de sa grossesse et l’avenir nous fait peur.
Nos enfants et petits enfants sont loin. Ils sont face à un problème et nous ne pouvons pas agir. Cette impuissance nous fait souffrir.
La génération d’au-dessus disparaît ; cela nous conduit à penser à comment ne pas peser sur nos enfants quand nous serons dépendants.
La maison de retraite est une mauvaise solution ; le problème essentiel n’est pas la dépendance ou la maladie, mais l’isolement. Une personne âgée qu’on ne voit pas tous les jours baisse rapidement. Dans d’autres pays, les gens sont moins isolés.
Il y a beaucoup d’initiatives locales et ça ne viendra pas d’en haut.
J’ai été interpellé par une réflexion de ma fille : « J’ai mis au monde un condamné à mort » ; elle s’est reprise en suite « un mortel ». Pendant longtemps elle ne voulait pas d’enfant ; maintenant elle se dit « pourquoi arrêterais-je cette chaîne qui dure depuis si longtemps ? »
L’éloignement des enfants est aussi un souci puisqu’ils ont vocation à repartir au Pérou.
Les limites qui viennent avec l’âge imposent que nous soyons aidés. C’est difficile à accepter. Pour moi par exemple, quand ça sera nécessaire, la toilette par quelqu’un d’autre sera difficile à accepter.
Nos possibilités diminuent ; il faut par exemple une semaine pour récupérer d’une fête.
On fait avec. La limite d’aujourd’hui n’est pas celle de demain.
Pendant les 18 ans d’invalidité de mon mari, j’ai tout assumé seule, en refusant l’aide qu’on me proposait. Je réalise aujourd’hui combien on a besoin d’aide.
Ma limite est celle que je prête aux autres, par exemple dans mes relations avec mon fils ; ça m’empêche d’avancer, mais j’en suis là pour le moment.