L'ACCEPTATION DE LA DIFFÉRENCE

(Paris 11 janvier 2002)

Nous sommes volontiers convaincus que pour nous, « la différence ne pose pas de problème… », et pourtant…

Ma différence est aussi ma solitude ;

La conscience claire de mon identité est la condition nécessaire pour reconnaître le droit de l’autre à sa différence ;

Il suffit de regarder, d’entendre le monde, l’Europe… notre pays, notre milieu de travail, notre entourage, notre famille, pour voir les différences : choix de vie, faire ou être, opinions politiques et religieuses, sens du travail, de l’argent, etc.

Que dire du même événement vu par un regard de 20 ans, de 45 ans, de 70 ans ?

Souvent, dans la rencontre, on cherche les affinités, les points communs : c’est rassurant, confortable.

Mais nous vivons aussi d’intenses curiosités envers cet autre si différent parfois. Nous sommes éblouis ou choqués.

Quelle est la place de l’Amour, dans l’acceptation de la différence ?

A - Quand on devient différent, on se retrouve seul. (exemple : le veuvage).

Les enfants, qui vivent tous différemment.

Certaines personnes vivent différemment de nous, et cela peut nous faire envie… et nous aider à nous connaître mieux.

Dans la confrontation à la différence, la solution : donner plus que ce qu’on croit recevoir…

A tout âge, on découvre des gens différents et c’est merveilleux.

B - La différence, la variété, c’est vraiment la vie : heureusement que nous ne sommes pas des clones…

-          Si on accepte la différence de l’autre, il se crée alors une relation ;

Nous sommes créés à l’image de Dieu, avec une très grande différence.

Quand la violence apparaît, à partir d’un moment, il n’y a plus que la prière, et Dieu fait ce qu’il faut…

Comment réagirons-nous quand nous serons devant Dieu ?

C - Quelle est la place de l’Amour dans l’acceptation de la différence ?

Dans l’Amour, la différence peut s’exprimer dans l’écoute ;

Nos filles acceptent maintenant leurs différences, il n’y a plus de rivalité entre elles et elles acceptent la personnalité nouvelle de leur plus jeune sœur

D - J’aime bien  l’identique. Je vis dans un « melting pot » : 50 nationalités différentes.

Les différences de culture, c’est ce qui fait la vie. La multiplication des voyages gomme peu à peu les différences.

Je crains l’uniformisation du monde à cause des échanges de plus en plus faciles ; il n’y aura plus de mystères.

Dieu est différent de moi.

A l’intérieur de nous-mêmes, il y a des différences, de multiples facettes qu’on essaie d’unifier ;

Qu’est ce qui fait notre identité ?

E - L’expérience de l’Autre est quotidienne.

Je vis dans une tension permanente : j’ai absolument besoin des autres, et j’ai peur des autres.

C’est des autres que viennent l’Amour et la joie.

On peut toujours faire de beaux discours sur la richesse de la différence, mais je n’aimerais pas habiter les quartiers nord d’Asnières…

Dieu, c’est le Tout Autre, c’est facile et mystérieux !

Il ne faut pas nier les différences.

F - La différence c’est une chance,  une valeur énorme : l’autre est forcément différent. C’est une erreur de vouloir gommer les différences.

Comment se respecter, quand on a des valeurs qui ne sont pas du tout les mêmes ?

Au sein de la Mission de France, il y avait des différences, mais nous avions une mission commune.

En Tunisie, surtout au moment du Ramadan qui est pratiqué par tous, je me sens encore plus différent.

Dieu, c’est pas la même chose que nous : il est Père, Fils et Esprit.

Pour Teilhard, l’Amour différencie, c’est-à-dire que, plus on aime quelqu’un, plus on souhaite qu’il mette en valeur ses différences.

G - Quand j’étais étudiant, je faisais pas mal de petits boulots et rencontrais des gens différents, mais je savais que ma trajectoire future serait complètement différente de leur quotidien que j’avais partagé l’espace de quelques semaines;

l’Autre, c’est pour moi un monde différent du mien et pratiquement inabordable. Plus je vais, et plus je trouve que les gens sont différents de moi.

J’admire les gens qui ont accès aux milieux extrêmes (St Vincent de Paul « ministre de la santé » de l’époque, était de plain-pied avec les plus malheureux). Comment parvenir à la rencontre de l’autre en dépassant l’appartenance au milieu social ?

H - Ce sujet m’a beaucoup plu, surtout la dernière question. Je m’intéresse beaucoup à l’Autre, sous l’aspect de la « mémoire coloniale ». J’ai vu, au Musée des Arts Africains et Océaniens, l’exposition « Cannibales et Vahinés ».

Qui sommes-nous vraiment ?

L’Autre n’est pas l’Autre, il est « construit dans une histoire »  par d ‘autres (anthropologues du moment, chroniqueur de l’époque). C’est ainsi que nous le percevons, et non pas tel qu’il « est ».

La « peur de l’Autre », ce n’est plus « ma » peur de l’Autre, mais la peur de la représentation que l’Autre a de moi, car le regard que je pose sur lui est faussé.

I - Le consensus contre l’arrêt Perruche à l’Assemblée Nationale aujourd’hui m’a fait énormément plaisir, « Naître n’est pas un préjudice. » Notre société s’est retrouvée autour de quelque chose d’essentiel, de sacré : la vie, même avec un handicap.

Accepter la différence en recherchant ce qui unit.

Accepter la différence de nos enfants à travers l’amour que l’on a pour eux, et qui permet peu à peu de les comprendre, de les rejoindre en profondeur, dans l’essentiel ;

Refuser la peur que peut entraîner le sentiment de la différence. Mettre l’Amour à la place.

La prière peut beaucoup.

C’est intéressant et passionnant de découvrir les différences des autres peuples à travers les voyages.

Et quelquefois, c’est insupportable de vivre à côté de personnes d’autres cultures, qui simplement parlent trop fort…


*    *     *

Participation de Robert Angèle (par courrier)

Il est certain que l’on ne peut pas être parfaitement à l’aise auprès de quelqu’un par trop différent de nous, de ce que nous sommes, de ce que nous vivons.

Il est bon de tendre à gommer les différences, de se mettre en route vers plus de fraternité. Mais dans ce sens on fait ce que l’on peut et non ce que l’on veut.

Nous ne sommes pas parfaits. Je pense qu’il faut apprendre à accepter cette limite comme toutes les autres.

Il est évident que le solitaire ne vit pas la même chose que celui qui ne l’est pas.

Comme tous les êtres humains, nous ne sommes pas parfaits, mais nous sommes perfectibles. On peut être amélioré.

Il y a quantité de tâches que l’on ne peut achever. Il faut bien se dire que ce n’est pas à force de volonté et d’habileté, uniquement, qu’on en verra le bout.

Dieu est parfait et est toujours prêt à nous aider, si nous choisissons de nous engager sur les chemins qu’il propose. Aussi, il faut le lui demander et ne jamais se lasser de lui demander de l’aide. Les progrès sont toujours très lents. Ne jugeons pas nous-mêmes, laissons-le les juger lui-même. Dans la prière, il peut nous aider en nous prêtant son regard sur nous-mêmes et sur les autres. Et quelle tranquillité d’esprit dans ces cas-là.

La miséricorde qu’il a pour nous, si nous nous en rendons compte, est bénéfique car elle nous invite à être plus miséricordieux pour les autres en commençant par ceux qui nous sont les plus proches. Avec Dieu, gommer les différences est aisé, c’est lui qui fait le travail.

Je crois qu’il faut éviter de rechercher ce qui nous satisfait au détriment de l’autre, de rechercher à passer pour quelqu’un d’important, même si on l’est en réalité dans l’échelle sociale. L’échelle des valeurs vues par Dieu est très différente. Il ne juge pas selon nos critères, et heureusement pour nous.

L’amour. Dieu est amour, et il a mis à notre disposition quantité de repères pour apprendre à aimer plus facilement. Il y a la famille, les amis, l’homme ou la femme qu’on aime particulièrement… Dieu aime infiniment plus que le meilleur des parents, que le meilleur des époux. J’ai cette certitude absolue depuis ma conversion. L’amour a toujours eu la première place. Tout ce qui découle de l’amour qu’est Dieu. L ‘amour de Dieu est présent dans l’amour qu’on peut porter à quelqu’un. Si Dieu n’était pas amour, on ne saurait pas ce que c’est.

Parler ou écrire, ce n’est pas trop difficile, ni trop pénible, mais il faut mettre en pratique et là, sans l’aide constante de Dieu, c’est absolument impossible. La tâche est monumentale.

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