MA VIOLENCE ?

(Aix en Provence 26 novembre 2001)

° Je n’ai jamais été violente. Parents calmes, vie à l’étranger. C’est à 20 ans que j’ai ressenti cette violence, j’arrivais d’Afrique, des « Parisiens » me critiquaient, intérieurement violence (crise d’aérophagie) puis j’ai extériorisé verbalement, je me révoltais. Maintenant c’est un état second. Je me calme… mais j’aime me mettre en colère devant les gens, alors que je suis calme intérieurement. Je suis donc violente par réaction, alors que je suis flegmatique par nature.

° Je me sens d’une violence inouïe et non calculatrice. J’essaye, alors que je suis soupe au lait, de me contrôler, sans indifférence. Ex : on engueule la voiture du c… qui n’avance pas, on le double… et on se rend compte que c’est une Mamie ennuyée… cela me fait mal, de la peine… C’était encore inopportun, inutile. A 48 ans j’essaie de limiter ces manifestations ; si j’y réfléchis, en fait, cela me paraît ridicule. Bref, je n’ai pas trouvé de bénéfice à cette violence, qui est pourtant le ressort de l’homme. Comment trouver la meilleure voie pour exprimer cette violence ?

° Je ne pense pas être violent… sauf en voiture. Mais depuis 4-5 ans je change. Dans la descente de Vitrolles que j’emprunte tous les jours, quand je vois des irrégularités, je bous, en fait je ralentis, je prends mon temps, et pourtant je me sens agressé. J’ai le cœur qui palpite. Je ne me fais pas violence non plus. Depuis que j’ai un travail qui me plaît, je ne me fais plus violence pour aller travailler. Avec mon fils Frédéric je montrais le martinet, père fouettard (je sais que c’est une horreur) : j’étais mal, notre couple allait mal, il en a bavé…

° Je ne supporte pas Joël quand il est justicier du volant. Ma violence : surtout par les mots et la mépris, ce que je pense être plus blessant que l’agressivité corporelle. Mon nom de jeune fille est MARTINET !

 

° Moi aussi ma conduite en voiture génère de la violence. C’est un bon exutoire, je crois. Dans le reste de la vie, si je ne suis pas sous tension je ne suis pas violente. Comme souvenir j’ai donné une « tarte » aux enfants. Une fois, j’ai donné un coup de ceinture, sans lui faire mal, mais cela m’a fait peur. Je suis vite sur la défensive, et donc manifeste une certaine violence (en amour aussi). Je ne me suis jamais violentée. Parfois je me fais violence pour faire ce que je dois faire (plutôt que de la musique !).

° Comme les autres, je suis violent au volant, par réaction contre des gens qui font un acte dangereux. Je m’en veux après. Ma réaction naturelle est de trouver un consensus. Quand je me mets en colère, c’est une colère presque raisonnée : je le fais exprès. Milieu professionnel c’est presque simulé, dans le domaine privé c’est parce qu’il n’y a pas d’autre solution ou si je sais que c’est une mauvaise solution. En tant que Parents, j’explose parfois, ça me fait le plus grand bien.

° Quand j’étais plus jeune, j’étais très timide et milieu très simple. Arrivée en ville je me sentais différente sans aucune confiance en moi. J’ai appris, j’ai eu beaucoup de violence contre ces préceptes de la société. Dans mon travail de fiscalité, j’ai toujours plaisir à apaiser les contribuables qui arrivent en colère et dans l’incompréhension (j’ai moi-même une certaine rébellion, contre certains textes de lois et l’Etat tout puissant). J’essaie quand il y a bonne foi d’être à l’écoute et de faire mon possible pour les aider. En voiture je ne vois pas très bien, je suis distraite, donc je fais énormément attention à ce que je fais et ensuite les autres ! J’ai fait remarquer à un Monsieur qui m’a carrément pris la place que j’attendais (ses filles étaient avec lui) qu’elles auraient les mêmes problèmes plus tard avec des hommes comme leur père… il était furieux…

Je suis très en colère contre l’injustice. Avec mon fils que j’ai élevé seule jusqu’à 7 ans, une fois j’ai frappé avec une ceinture car je ne m’en sortais pas, je ne sais plus pourquoi mais je ne regrette pas car c’était la seule solution à ce moment-là.

Je pense qu’il vaut mieux parler, avec calme que retourner la colère contre soi. Je m’y emploie…

° Je suis fier d’être agressif, pas fier d’être violent. Agressif : mordre en paroles la vie. L’incivisme me rend agressif, le manque de temps aussi (je me programme toujours, quand je n’y arrive pas, cela me rend violent). Quand notre fils était malade, sans raison apparente autre que le stress, j’avais le réflexe de vouloir me défendre (couper le canon d’un fusil de chasse).

- Fausse violence : celle du cinéma, pour faire peur à l’autre exemple : dernier fils 4 ans, a cassé son jouet, j’ai piétiné un autre jouet très froidement. Autre exemple : voisin qui enlève pot d’échappement, le bruit +++. J’ai pris une masse, l'ai menacé de détruire son engin : il a compris et s’est arrêté.

- Violence froide : folie - je ne supporte pas la cigarette. Dans le RER je demande à quelqu’un d’arrêter de fumer sa pipe… il a eu vraiment peur de mes menaces car il ne voulait pas s’arrêter.

- Violence non contrôlée : j’étais très fatigué physiquement et moralement à bord d’un bateau, en Polynésie. C’était en 68, pas de nouvelles de la famille – levé à 03 h sans avoir dormi (bringue à côté) je vais chercher un ciré, j’ai senti que quelqu’un était derrière la porte, coup de poings, j’ai pris un couteau, j’ai failli tuer le type. Je suis allé au boulot. En rentrant, je l’ai retrouvé, menton fendu. C’était un Tahitien qui s’était trompé de cabine. J’ai eu très peur rétrospectivement de cette « folie ». Je peux donc être très violent.

° Je suis Pingouine de Paris. Arrivée à Avignon depuis 1 an. Amis communs en Afrique, en Côte d’Ivoire, groupe Catholique. Je viens de terminer un livre sur ce problème (publié chez Bayard). Je suis psychiatre (psychanalyste + un projet « foireux »). J’ai une fille vietnamienne 7 ans que j’élève seule et qui pose des problèmes. Depuis 3 semaine je vais mieux, (livre terminé). Je vais rouvrir un Cabinet. Je vis sur « la performance » la bagnole, c’est mon espace de liberté, je vais très vite en écoutant de la musique. Je fais à peine plus attention quand j’ai ma gamine avec moi. C’est vraiment le pied.

L’agressivité vraie, c’est en arrivant à Avignon que je l’ai découverte. C’est une force de vie. Avec ma gamine, introvertie, rejetée par le système scolaire : elle a peur de plus en plus, elle a été étiquetée « psychotique », c’est le summum de la violence. Ma force de mépris plus mon éducation très bourgeoise avec beaucoup d’interdits sociaux liés à ma famille, ma fortune, ma sécurité. J’ai été éduquée, je suis là, tout m’est dû. Ma sœur m’en a beaucoup voulu. La communication par le corps est importante pour moi, articuler ma force de vie avec celle des autres. Avignon c’est petit. La violence c’est ne plus pouvoir communiquer. Mort de la conversation au profit de la problématique de l’emprise du pouvoir. Je peux désormais, me sentant plus solide, imaginer pouvoir aider les autres. J’ai réfléchi sur l’incarnation, la perfection divine.

° Je n’ai pas de violence en voiture. Une fois j’allais trop vite, j’ai été arrêtée, je ne disais rien, le policier était étonné, il m’a laissé filer.

Trois notions : Passion – violence non – agressivité oui, je le suis ? Je ne supportais pas, dans mon travail, la discrimination sociale, l’injustice m’est insupportable. Avec mes enfants, j’ai appris à ne rien dire, je reviens plus tard et on s’explique. Une malade m’a dit une fois « on voit tout sur ton visage » ou encore « tu as un regard qui tue ».

Quand je suis violente, je m’adresse au Seigneur qui l’est aussi.

° Né en 1945 j’ai pu ne pas subir la Guerre d’Algérie. Je n’ai jamais donné de coup de poings, jamais reçu non plus. J’ai une violence verbale forte.  Au niveau Politique : intervention en Afghanistan, je me sens concerné, je choisis mon camp. Cela m’incite à être moins violent dans la vie quotidienne. Choix politique pour moi est un moyen d’expression de ma violence.

° Je suis très violente, petite j’étais violente avec ma sœur arrachait les cheveux etc... Je n’ai jamais pu faire de mal à un animal.

Désormais je ne suis plus violente c’est que je suis au 36° dessous. J’ai déjà battu Christian. Je me méfie de mes mots car je pense être très méchante et je préfère donner un coup de poing. Par mon métier je sais que les mots restent. Je suis violente quand je me sens agressée. Camille pour la calmer il fallait la prendre par les cheveux et la mettre sous la douche. Mais les enfants ne l’ont pas ressenti comme quelque chose de très méchant mais d'impulsif.

Je suis violente avec moi-même une fois j’ai hurlé et suis devenue sourde et Camille a compris que c’était de sa faute.