VIVRE ENSEMBLE ET VIOLENCE
(La Pourraque 13 et 14 octobre 2001)
Autour de Léon Darraïdou, coordinateur national des « pingouins », étaient présents : Agnès et Christian Blanchard (Nice), Lucien Leroy (Puget/Argens), Christine et Joël Allard, Claudine Basset, Gilbert et Francette Bon Mardion, rejoints le dimanche par Marcelle Argémi, Claire et Laure-Anh Carrier (7 ans).
Les témoignages
La violence est générée par une perte du sens, et par l’acceptation ou non de la différence de l’autre. L’acceptation de codes sociaux et la mise en place d’interdits permet de canaliser la violence, mais cela suppose aussi de prendre en compte l’autre et les autres avec leurs droits légitimes à la différence.
L’acceptation de l’autre passe par la prise de conscience de sa propre identité. On ne devrait pas revendiquer son identité sans reconnaître à l’autre le droit à la différence. A l’heure actuelle, la recherche d’identité engendre le refus de l’autre, l’ostracisme et donc un regain de violence.
Mes codes sociaux sont consentis librement et respectés mais les couches sociales mises à l’écart ont du mal à les reconnaître surtout quand elles sont mal intégrées dans la société actuelle.
La violence naît d’un sentiment d’exclusion, d’où les questions qui se posent :
Quelles violences dans nos vies concrètes ?
Où en suis-je dans ma vie par rapport à la justice et la vengeance ?
La gestion des conflits : comment les vivons-nous ?
Le courage ou le manque de courage face à la violence.
La violence est une démarche inconsciente ; le violent est un pantin dominé par ses sentiments ; l’ego prend le dessus et il perd son âme. La réponse à la violence, c’est de retrouver son âme et la lumière se fera. On est manipulé par la violence ; pour s’en sortir, il y a la prière, mais il faut une décision personnelle. Toute évolution se fait dans la violence.
L’être humain est par naissance et par essence violent. Le problème est de canaliser cette violence. Chacun est violent même par la non-violence. La non-violence de Gandhi était insupportable à certains et ressentie comme une violence. Il faut vivre avec, et tout le problème est de savoir comment.
Pour vivre ensemble, il faut accepter l’autre, et les codes de la société sont là pour nous y aider. Les lois sont valables pour tous, décidées ensemble ; ce fut le cas lors de la Révolution française, ce qui n’empêcha pas la violence. Si la loi n’est pas respectée, cela impose des « punitions ». Au nom de la liberté on oublie la loi. J’ai vu grandir la violence lors de ces quarante dernières années.
Toute religion fait naître la violence car on ne respecte ni la pensée ni la croyance de l’autre.
Les lois nous enferment dans une manière de penser et on devient vite sectaire. Dans l’économie capitaliste on s’est fait à une façon de penser qui devient notre code de référence. On en perd le sens si on ne fait vivre que le code, il est à faire évoluer selon les besoins.
Les règles ne sont pas les mêmes pour tout le monde et cela engendre la violence. Comment aider la démocratie, comment aider les personnes. L’agressivité vient de la peur et du manque de confiance.
La violence est permanente à l’école.
Le courage est nécessaire pour retrouver notre âme et notre sérénité.
Dans l’analyse des causes de la violence, il y a aussi l’individualité. Les codes sont nécessaires dans tout groupe et les violences nous remettent en cause. Comment faire pour réagir dans des groupes où les personnes sont si dissemblables ?
Le culturel, le cultuel et le politique ne peuvent aller vers l’universel. Les moyens de communication, d’assemblage, sont à trouver.
Une des choses les plus graves, c’est la religion d’état. Il faut en sortir.
Il y a deux formes de violence, individuelle ou collective. Quand je suis agressé par quelqu’un, je ressens un manque de sécurité ; la violence collective naît d’une frustration souvent causée par un environnement économique et social qui conduit au désespoir. Je comprends que l’on devienne violent ; exemple, les Palestiniens. J’ai été choqué par les réactions d’incompréhension de deux personnes d’origine juive pas concernés directement et qui prenaient fait et cause pour leurs coreligionnaires.
Il y a des groupes sociaux qui sont des prédateurs, menés par leurs intérêts ou le besoin de domination. Le prédateur mène sa démarche avec beaucoup de moyens, y compris la ruse, et les réactions de l’agressé ne peuvent être que violentes. La violence est l’arme des faibles.
En 39, il paraissait évident qu’il fallait taper sur Hitler, et le refus de la violence a engendré une plus grande violence.
Par définition on est tous différents déjà dans sa famille, son travail, son voisinage. On évalue les choses d’après ses propres repères et on se trouve vite en désaccord. La sagesse, c’est de savoir écouter l’autre pour relativiser.
Plus on est engagé, plus on a quelque chose à quoi on tient, et plus on veut défendre son point de vue ; on devient vite intolérant. Il est nécessaire de trouver des médiateurs pour dédramatiser le conflit. Des media objectifs peuvent nous aider à grandir.
Les personnes déshéritées peuvent très vite tomber dans la violence. L’éducation devrait aider à lutter contre la violence.
Le conflit a une vertu, il n’est pas forcément négatif.
Je me rends compte qu’inconsciemment je peux susciter de la violence de par mon style de vie, mes prises de position.
Je pensais que les codes moraux étaient immuables, il faut reconnaître que tout évolue, par exemple dans les années 40, une femme était guillotinée pour avoir pratiqué des avortements.
J’ai été frappée par une remarque de M. Bush qui découvrait qu’il était entouré de beaucoup de musulmans. Le fait de vivre en cercle fermé qui ignore les autres est aussi une violence.
L’intolérance me fait peur alors que moi-même j’ai été très intolérante. Il faut comprendre.
Aujourd’hui les phénomènes d’exclusion sont renforcés. L’exemple est celui du tapis roulant dont la vitesse est calquée sur celle d’un homme à pied ; mais il faut marcher sur le tapis et la vitesse de la marche est donc deux fois la vitesse naturelle. Si on est plus dans le rythme, on est exclu.
Il faut distinguer violence et agressivité. L’agressivité est la manifestation comportementale, de type instinctif, de la violence. Il y a une bonne violence à respecter.
Les jeunes qui écoutent leur Walkman dans le métro sont dépendants du rythme qu’ils entendent qui ne correspond pas à leur rythme interne. La recherche de la différence renforce l’isolation. Il est nécessaire de réanimer la relation. C’est pourquoi j’aime l’icône de la Trinité de Roublev centrée sur la relation entre les trois personnes de la Trinité. De même il faut une relation entre les espaces de vie.
J’attends du groupe un partage paisible et… dans l’humour !
La violence est vitale ; la vie est faite de violence, exemple : l’accouchement. Elle est nécessaire à toute personne pour prendre sa place et pour se nourrir : on supprime la vie (animale et végétale) pour manger. Il y a des moments où on doit être violent, face à l’inacceptable, même si les limites peuvent évoluer.
L’agressivité personnelle qu’on peut avoir auprès des autres dépend de notre état de sérénité ou de stress. Dans les périodes difficiles, on éprouve le besoin de se protéger : j’ai acheté un fusil pendant la maladie de notre fils par besoin de protéger ma famille d’autres attaques.
Quand on est agressif ou violent, on n’est pas bien.
L’agressivité est une réponse défensive à l’attaque du territoire ou de l’intimité. Les canaux qui stimulent l’agressivité sont la faim, la sexualité, la défense