Paris. 25 janvier 2006
8 présents, 2 excusés
« Mais le Fils de l’Homme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ? » Matt. 18, 8
« Pourquoi avez-vous peur, gens de peu de foi ? » Matt. 8, 26
« Ne soyez pas si inquiets. Ayez confiance en Dieu, et ayez aussi confiance en moi. » Jean 14,1
Quels sont les axes qui personnellement me paraissent essentiels et fondamentaux dans cette évolution ?
- Quelle Eglise, pour quelle foi ?
- Quelle Eglise, pour quel message ?
- Quelle Eglise, pour quelles actions ?
- Quelle Eglise, pour quelle communauté ?
Pour les non-croyants, la question peut se décliner ainsi :
- pour moi, l’Eglise est-elle un vestige du passé, ou a-t-elle encore un rôle à jouer (social, moral, humaniste…) ?
Je désirais nous entendre tous sur ce sujet, car, m’occupant depuis longtemps de catéchèse, je suis parfois tentée par le découragement : outre le fait que le nombre d’enfants catéchisés décroît régulièrement, ceux qui le sont nous posent question : sur 12 enfants de CM2, une petite fille vient d’arrêter car elle ne croit pas, et deux continuent, dans le même état d’esprit, obligés par leurs parents… L’environnement (familial, social…) y est sûrement pour quelque chose.
J’ai aussi réfléchi de mon côté, aux raisons qui poussent au pessimisme pour l’avenir de l’Eglise :
- les repères laissés par le christianisme s’effacent dans la société civile(le caractère sacré de la vie ; les repères familiaux ; le principe de charité souvent remplacé par la défense systématique des intérêts personnels) ;
- la foi est souvent une foi à la carte, même chez les catholiques pratiquants ; elle ne se transmet plus comme un héritage précieux (libre choix laissé aux enfants d’être ou non baptisés plus tard ; absence de culture religieuse chez beaucoup d’enfants baptisés…)
Pourtant, l’Eglise-institution est toujours parole de paix pour le monde. Elle est présente dans les coups durs de la vie des peuples.
Elle a 2000 ans : pourquoi une telle longévité, unique dans le monde ?
Elle est visible, et ne suscite pas l’indifférence. Le pape est régulièrement visité par des chefs d’état de tous bords. Elle dérange parfois les pays aussi bien que les hommes.
Au sein de la communauté catholique, si elle est souvent critiquée, elle est vivante (dernières manifestations : JMJ, journée des missions, semaine pour la paix, journée de communication, l’œcuménisme…)
L’Eglise est en crise aujourd’hui, ce n’est pas la première fois…
L’Eglise, c’est aussi l’ensemble des chrétiens, elle n’a pas la même visibilité humaine, et il est plus difficile d’en parler. Elle est pourtant une réalité.
Dans les trois citations de l’Evangile, Jésus centre son propos sur la foi, qui n’est pas assurée. Pourtant, c’est sur elle que repose son Eglise, et tout mouvement d’inquiétude ou de peur trouve sa guérison dans un mouvement de foi.
Si l’Eglise est en crise, c’est peut-être nous qui avons d’abord besoin de nous guérir…pour transmettre plus visiblement le message d’Amour de Dieu ?
L’Eglise, c’est nous, c’est moi…
Plus je constate l’absence de Dieu autour de moi, plus je me dis que je dois « me mouiller », m’engager, vivre « autrement », essayer de rendre un peu plus visible l’Amour de Dieu dans ma vie.
Pour moi, cette situation, qui me touche, se transforme en un appel à un effort personnel, pour retrouver l’essentiel du message évangélique et le vivre au mieux.
J’ai du mal à croire l’enseignement de l’Eglise actuelle, qui est déphasée par rapport à la connaissance d’aujourd’hui. Son langage est incompréhensible.
Je n’ai pas la chance d’avoir la « foi du charbonnier », et pourtant l’existence de Dieu ne peut pas être niée. L’homme a conscience de son intelligence ; le phénomène religieux fait partie de l’humain. Depuis le judaïsme, Dieu est incontournable. On peut bâtir un modèle cohérent qui implique Dieu.
La science a évolué : 14 milliards d’années de matière, puis la vie, puis l’intelligence, puis l’idée de Dieu : on accouche de l’intelligence après la violence de la matière : on est à l’aube d’une nouvelle ère : d’autres Terres, d’autres vies, il faut reconstruire Dieu… On a tous le même âge, (14 milliards d’années), on a vécu des millions de fois : je rêve d’une Eglise qui essaierait de réfléchir sur ces phénomènes-là… l'amour s’exhale de la matière à partir de la vie, d’une Eglise qui s’intéresserait à la science. L’homme est un chef d’œuvre de cybernétique. La vie est un équilibre précaire.
Je crois dans un Dieu, mais il faudrait que l’Eglise reconsidère certaines choses : la Vierge Marie… le problème scientifique… le mécanisme de Dieu.
Si on n’applique pas la charité, c’est cela qui sera l’enfer.
J’admire Dieu dans toute sa création. C’est l’Esprit qui prend conscience de tout cela.
Qu’est-ce que je suis prêt à engager pour l’Eglise ? Est-ce que je ne suis pas passif ? Ne pas exiger si on ne fait rien : c’est facile…
Ma cellule d’Eglise : la Mission de France, représente une forme de pauvreté, de liberté : la virginité de Marie n’a aucun sens par rapport à la foi ; le credo est la façon de transmettre la foi mais je ne peux pas le dire comme ça.
Je rêve d’une Eglise d’amour (pas forcément de celui qui nous plaît), de joie et de réflexion (par rapport à la psychologie, à la psychanalyse).
L’Eglise future comportera davantage de « confessants », de personnes qui retourneront vers elle par une foi redécouverte, et non plus transmise.
Notre société est athée et violente (car il n’y a plus de place pour Dieu) ; et en même temps on y trouve une reconnaissance de l’autre, une attention aux gens.
L’Eglise sous sa forme de « pratique rituelle » est en train de mourir.
Rêvons à une Eglise aux questions et à la culture contemporaines et non accrochée aux dogmes, à une foi qui avance et qui nous transforme.
Je me sens bien dans la communauté ecclésiale. Je suis triste si on l’attaque, si elle se ferme. On a besoin qu’elle nous bouscule, qu’elle nous rappelle le caractère sacré de la vie.
(Un Jésuite qui était allé soigner des malades du typhus dans un camp de concentration disait :
« Si personne ne va plus s’occuper de ces gens-là, il n’y a plus d’hommes »).
Il faudrait qu’elle renouvelle son langage ; on a besoin de belles liturgies, de prier.
Mais il y a aussi beaucoup de valeurs chrétiennes chez les jeunes (soif de justice…)
On a la chance d’avoir de nombreux prêtres et laïcs engagés en France, notamment dans des mouvements comme le CCFD. Si tout était évident, on n’en ressentirait pas le besoin…
Pour moi, la foi est très liée à l’Espérance.
En tant que chrétien, il m’est important de faire corps et d’appartenir à une communauté qui rassemble tous les chrétiens (Eglise au sens large). Il est important qu’il y ait une diversité et une tolérance les uns à l’égard des autres.
Je suis né et j’ai été élevé dans une culture et un environnement chrétien à une époque où les valeurs chrétiennes se retrouvaient dans les valeurs de la société. Aujourd’hui il y a une différence et même une opposition entre les valeurs véhiculées par la société et celles affirmées par l’église. Ce décalage donne l’apparence d’une église rétrograde qui n’a pas su s’adapter. La difficulté est de maintenir des valeurs auxquelles on croit. Dans ce contexte, nos enfants ont pris de la distance avec la religion et l’église. Toutefois, au travail, j’ai eu l’occasion d’engager des discussions en affirmant ma croyance sans qu’il y ait de problèmes.
Qu’en est-il pour moi ?
Ø Je suis intéressé à découvrir la vie des premiers chrétiens et leur engagement ;
Ø La simplicité de l’évangile en fait sa force ; c’est le monde à l’endroit dans ce monde à l’envers ;
Ø Les hommes de foi qui vivent l’évangile me parlent et me bousculent, à comparer aux vedettes de la politique.
Toutefois, je m’interroge sur un anti-christianisme qui se répand dans les livres et les médias ainsi que sur un respect tolérant de l’Islam ou une intolérance.
L’avenir de l’Eglise est celui que les chrétiens feront. J’ai confiance dans son message d’amour et sa foi dans l’homme (voir les béatitudes). L’Eglise est forte de sa faiblesse.
J’aime bien aborder cette question de l’avenir de l’Eglise. Comme une grande rencontre (Action catholique…) de gens qui mettraient en marche l’Evangile.
Je me retrouve dans un institut d’Eglise par lequel elle se rend présente au monde. C’est une foule inconnue, où chacun, quelle que soit sa compétence, trouve un engagement à sa taille. L’Eglise peut mutualiser une telle entreprise. Dieu a besoin des hommes.
Les scientifiques me rassurent : l’univers n’a pas eu besoin des hommes. Notre éternité n’est pas celle de l’infini du monde.
Avons-nous atteint l’humanité de base (tout homme est-il libre de la faim, de la maladie ?)
Dans les générations passées, le fait de se savoir pécheur faisait ressentir à chacun le poids de ses actes.
Aujourd’hui, il y a moins d’outils de compassion, de barrières à l’indifférence.
« Chaque fois que vous êtes réunis en mon nom, je suis au milieu de vous » : l’engagement de l’homme pour quelque chose qui est au-delà de lui est un signe de foi : Dieu est là.
L’Eglise, aujourd’hui, est dans une situation critique semblable à celle qui a précédé le concile de Trente, mais les causes sont complètement différentes : au XVe siècle, les désordres provenaient plutôt de l’Eglise alors qu’actuellement elles viennent principalement du monde extérieur.
Pendant le XXe siècle, l’homme s’est cru de plus en plus puissant, de plus en plus indépendant de toute contrainte humaine et encore plus religieuse. Il s’est un peu pris pour Dieu. Beaucoup de contraintes, de règles sociales ayant disparues, l’attachement forcé à une structure qu’est l’Eglise n’existe plus. D’où une perte considérable d’audience.
Depuis la 2e moitié du XXe siècle, l’hégémonie de l’homme sur l’homme et le monde a commencé à disparaître (colonialisme, communisme), l’Eglise aussi qui avait le pouvoir.
Ce qui est encore en train de disparaître : le mythe de la croissance infinie, la conquête de l’espace, - celle de la Terre est terminée -, le mythe de la consommation (avec la pollution associée, l’énergie en quantité limitée), le mythe de la science et de la technologie.
Les hommes sont maintenant face à un monde limité, à un homme limité, à un espace géographique limité, à une richesse limitée, à des déplacements limités.
L’homme va se retrouver face à des contraintes, alors qu’au siècle passé tout semblait possible : dans ce contexte difficile, l’Eglise et son message risquent d’être plus audibles, plus compréhensibles.
Concrètement, il faut qu’elle reste visible, pour que ceux qui ne peuvent mettre un nom sur leurs aspirations puissent en découvrir l’origine par l’exemple ou le témoignage.
Il faut qu’elle reste indépendante du pouvoir politique et du pouvoir économique.
Quand je vois l’Eglise célébrer les cérémonies de l’Etat (messe à Notre-Dame de Paris pour Mitterrand), ou KTO entre les mains d’Arnaud Lagardère, cela m’horripile… des sacrements de « complaisance » (mariages, enterrements…)
Le message de l’Eglise : comme pour le concile de Trente, l’Eglise restera fidèle à son message.
Les communautés vont évoluer vers plus de variété. La paroisse qui permet de relier les générations entre elles et les milieux entre eux a du bon : actuellement, les groupes se font beaucoup par affinité d’âges, d’intérêts. Il y aura davantage de mélange entre les clercs et les laïcs.
Qu’est ce que l’Eglise ?
Lors d’un voyage en Grèce avec des amis où je leur présentais les épîtres de saint Paulin situ, ceux-ci étaient étonnés que je ne leur montre pas d’églises ! Cela me renvoie en qui je crois.
L’Eglise aujourd’hui : j’y adhère, en faisant partie de la communauté des croyants. J’attache de l’importance à la lecture de la Bible, ensemble. Le Christ, Verbe incarné mène au Père. « Où demeures-tu ? Venez et voyez ». La prière seule ou à plusieurs est une manière de se tourner vers.
L’Eglise demain : faire confiance. Nos enfants n’empruntent pas les mêmes chemins que les nôtres. L’Eglise est dehors, elle est vivante. Il est peut être important que nous n’ayons pas la maîtrise de tout…
Comment entendre la demande faite à Abraham, quitte ton pays ?
L’église édifice s’est vidée et devient incompréhensible. On assiste à sa muséification. Mais il est important de rappeler que l’incarnation permet la représentation et l’image.
Pour ma part, j’ai à être en vérité, le reste ne m’appartient pas.