GRENOBLE

Témoignages de paroles fortes données ou reçues

favorables ou blessantes

Grenoble. 12 janvier 2007.

11 présents.

- À la veillée de Noël, notre fille et son ami nous annoncent une “bonne nouvelle” : on va se marier. C’est important d’officialiser un choix, même si on a l’habitude de les voir ensemble et que cette perspective paraissait couler de source.

Lorsque, j’étais jeune et cherchais ma voie en pensant à devenir religieuse, un prêtre qui était mon guide m’a dit : “ tu as deux pieds qui doivent t’aider à vivre avec les gens, pas à rester dans un couvent ”. Quand on a à prendre une décision, à faire un choix, il est bon d’en parler avec quelqu’un.

Un mot important de ma mère m’a marqué, au sujet de l’enfer qui me posait question : “l’enfer, c’est la haine que tu as en toi”.

- Dans mon enfance, j’ai été choquée par une expression émise comme un oracle : “les femmes n’ont pas de nerf !”, elles ont donc à obéir.

Une de mes sœurs m’a aussi vexée : “ne t’habille pas en rouge, ça jure avec tes boutons!”.

Quand je suis devenue salariée au diocèse après 25 ans de vie de femme au foyer, j’ai hésité à perdre cette liberté que j’avais conquise. Une parole d’Évangile m’a mise en marche : “qui veut sauver sa vie la perdra”.

Mes parents avant de mourir m’ont fait un cadeau de libération en me disant :

à toi maintenant !” (papa) et “regarde en avant” (maman).

- Dans ma jeunesse, des paroles m’ont mis en marche, comme ce que m’a dit mon père au sujet de ma vocation : “passe ton bac, après on verra”. C’est donc après le service militaire et un travail en usine que je suis entré au grand séminaire.

L’appel de l’évêque lors de l’ordination : “Marc, je t’appelle”, a été le tournant, avec l’impression forte de franchir un seuil.

Récemment, devenu aveugle et supportant beaucoup de problèmes de santé, j’étais en vacances à Saint Bernard du Touvet. Dans le silence de la chapelle, j’ai entendu une voix disant : “Marc ! je t’aime”, par deux fois. Depuis, je respire ma cécité, je vis “ma lumière”. Ce qui n’empêche pas de continuer à se battre.

- Dans mon milieu confortable de Bourgoin, le Père Klein m’a dit d’aller œuvrer à Jallieu. Ce fut une étape au cours de laquelle, comme moniteur de colonie, j’ai fréquenté des familles ouvrières.

Le Concile Vatican II fourmille de paroles fortes telles que : “l’Esprit agit dans le monde”

Et l’homélie de Serge : “si nos églises ne sont pas des crèches, Jésus ira crécher ailleurs !

Les gens que je côtoie me font souvent des remarques déstabilisantes :

Michel, tu aimes penser par catégories

Michel, tu ne parles qu’en terme de lutte des classes

Cela ne me conduit pas à modifier mon attitude, car je dois concilier des expériences en différents milieux : petite bourgeoisie, ouvrier d’usine, cadres, universitaire, tiers monde….. j’assume mon personnage, mais c’est percutant.

 

- J’ai reçu une parole forte qui a marqué un tournant dans ma vie à 35 ans, lors d’une confession : “l’important n’est pas nécessairement ce que vous avez fait, mais ce que vous avez à faire. L’analyse que vous faites de votre péché montre que vous avez en vous un potentiel qui doit passer en acte”.

Cette nécessité de poser des actes et non de demander seulement pardon de mon indignité, a continué à m’habiter tout au long de ma vie, et m’a gratifié. Je l’ai retrouvé dans une parole de Jean Erhart entendue à l’Arbresle : “ce que je n’ai pas fait, personne ne le fera à ma place”. En effet, il y a des appels intérieurs qui me sollicitent personnellement. Ce fut la découverte d’une dimension essentielle de ma relation avec Dieu.

- Je n’ai jamais reçu de parole forte. J’ai évolué, mais pas à la suite d’un événement phare ou d’une parole. Cela provient de ce que j’ai l’esprit critique, je me méfie de ce que j’entends, j’analyse.

- À quinze ans, un ami m’a dit en guise de compliment : “Tu es catho, mais vraiment ça ne se voit pas”. Cela m’a posé un problème que je porte toujours en moi.

Un peu plus tard, lors d’une croisière en Terre Sainte avec un groupe d’étudiants, un jeu consistant à dire un proverbe caractérisant chaque membre du groupe m’a gratifié de : “la critique est aisée, mais l’art est difficile”. C’était vexant, mais un peu vrai.

Dans l’Évangile, j’adhère totalement à la parole de Pierre : “Seigneur, à qui irions-nous ?”, qui est à la base de ma foi.

 

- Je n’ai pas souvenir de parole forte qui m’ait fait bouger. Je ne me fais pas atteindre par des paroles blessantes ou agréables. J’efface ...

J’ai un regret, celui de n’avoir pu parler profondément à maman avant son décès. Il fallait se risquer, et je ne l’ai pas fait. Elle m’a quitté sur ce conseil : “il faudra faire attention à papa”.

- Dans mon enfance, certaines paroles ont aiguisé mon esprit critique, comme ce professeur d’anglais disant toujours : “même quand la majorité a tort, elle a raison”. Par réaction, je me méfie de l’opinion des majorités, et je pense que l’absent a plus besoin d’aide que de critique.

En colonie, au retour d’une messe dominicale imposée par le catéchisme, j’ai retrouvé des copains écoutant en disque le livre du “Petit Prince”; et cela m’a paru plus important que la messe.

Un voisin de mes parents avait accueilli un étranger “bronzé” qui m’a demandé : “de quel pays suis-je ?”. Il était guyanais, et je ne savais pas où était la Guyane, donc je ne savais pas “tout”.

Comme exemple de parole donnée, je mentionnerai une technicienne qui, au moment de son départ, m’a dit : Merci de m’avoir toujours dit “vous”.

- Je n’ai pas le souvenir d’un fort retentissement de paroles reçues. Mais ceux à qui je parlais ont parfois réagi négativement et vivement à ce que j’avais dit. J’ai donc l’impression que les conséquences de mes paroles ont pu avoir plus d’impact que je ne le croyais.

- Un slogan m’a frappé dans ma jeunesse : “là où il y a une volonté, il y a un chemin”.

Un personnage parole fut, pour moi, mon père. Sa parole faisait autorité dans la famille.

Aux Kerguelen, j’étais l’assistant d’un météorologue broussard, personnage charismatique dont la parole et l’intégrité scientifique m’ont marqué. Nous campions, et dans le rugissement d’une tempête, il a suffi d’un : “on ne risque rien”, pour me rassurer.

Mon fils Clément m’a impressionné par sa faculté de parole, en témoignant à l’enterrement d’un ami, ou en faisant le sermon  à  son mariage.

Par contre, étudiant à Henri IV, je n’ai pas apprécié le baratin de l’aumônier jésuite qui, comme certains prédicateurs se croient autorisés à parler à la place de Dieu

J’ai été touché, lors de mon cours d’adieu à l’école d’hydraulique, par les compliments d’une élève sympathique. Un cadeau pour mon départ en retraite ...

*    *     *     *    *